AFFAIRE

Texte complet non disponible

Nom de l'affaire

Bundesgerichtshof, XII. Zivilsenat, XII ZB 99/01, 18 July 2001

Référence INCADAT

HC/E/DE 933

Juridiction

Pays

Allemagne

Nom

Bundesgerichtshof, XII. Zivilsenat (Cour suprême fédérale, 12è chambre civile)

Degré

Instance Suprême

États concernés

État requérant

Canada

État requis

Allemagne

Décision

Date

18 July 2001

Statut

Définitif

Motifs

Questions procédurales

Décision

-

Article(s) de la Convention visé(s)

-

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

-

Autres dispositions
Art 15; § 621 I Nr. 1-3, 6, 7, 9 ZPO (German Code de procédure civile), § 8 (2) SorgeRÜbkAG (loi mettant en oeuvre la Convention en Allemagne - remplacée depuis mars 2005 par la loi: IntFamRVG).
Jurisprudence | Affaires invoquées

-

Publiée dans

-

INCADAT commentaire

Mécanisme de retour

Droit de garde
Décision ou attestation selon l'article 15

Mise en œuvre & difficultés d’application

Questions procédurales
Exigence de traitement rapide de la demande (art. 11)

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

L'enfant, un petit garçon né en septembre 1998, était âgé de 2 ans à la date du non-retour dont le caractère illicite était allégué. Ses parents étaient mariés depuis 1997, avaient conjointement la garde de l'enfant et la famille résidait en Allemagne. En janvier 2000, les parents se séparèrent.

La mère canadienne décida d'organiser un séjour au Canada avec l'enfant. Craignant qu'ils ne reviennent pas, le père saisit le juge aux affaires familiales allemand d'Hildesheim le 28 janvier 2000 en vue d'obtenir une décision lui accordant provisoirement la garde exclusive et le droit de décider de la résidence habituelle de l'enfant. En février il retira sa demande au vu de la situation de la mère et de sa décision de retourner vivre au Canada de manière permanente dans un avenir proche.

Le 29 février 2000, le juge aux affaires familiales donna à la mère, avec le consentement du père, la garde physique exclusive de l'enfant, y compris le droit de choisir seule son lieu de résidence, au motif que cette décision était dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Le père consentit ensuite à des vacances de la mère et de l'enfant au Canada, où ils partirent en Juin 2000.

En août, il demanda à se voir attribuer le droit de déterminer la résidence de l'enfant, indiquant que la mère aurait dû rentrer en Allemagne avec l'enfant à l'issue d'une période de 6 semaines au Canada, ce qu'elle n'avait pas fait. Le 26 mars 2001, le père saisit le juge aux affaires familiales d'Hildesheim d'une demande tendant à voir déclarer le non-retour illicite. Il fut débouté en première instance comme en appel. Le père saisit la Cour suprême d'un recours.

Dispositif

Recours irrecevable. La Cour d'appel (OLG) est l'instance suprême en matière d'enlèvement sur le fondement de la Convention de La Haye. La demande en vue de déclarer le non-retour illicite, prévue par l'article 15 de la Convention, conduit à une décision intermédiaire, non pas une décision en matière familiale au sens de l'article 621 I Nr. 1-3, 6, 7, 9 du code de procédure civile -ZPO- contre laquelle un recours devant la cour suprême serait envisageable.

Motifs

Questions procédurales


Les affaires relevant du champ d'application de la Convention de La Haye sont soumises à une règle de procédure spéciale, l'article 8 alinéa 2 de la loi mettant en oeuvre la Convention en Allemagne (SorgeRÜbkAG, remplacée de puis le 1 mars 2005 par la loi IntFamRVG). La cour d'appel rend des décisions insusceptibles de tout recours.

La Cour suprême clarifia en l'espèce que la demande faite par le père (sur le fondement de l'article 15 de la Convention) était une demande relevant de l'article 8 alinéa 2 de la loi susmentionnée, et non pas une décision relevant de l'article 621 I Nr. 1-3, 6, 7, 9 du code de procédure civile. Par conséquent la décision rendue par la cour d'appel dans cette affaire ne pouvait pas faire l'objet d'un recours. Le recours du père fut déclaré irrecevable.

Commentaire INCADAT

Décision ou attestation selon l'article 15

Rôle et interprétation de l’article 15

L’article 15 constitue un mécanisme innovant qui traduit la coopération, élément central au fonctionnement de la Convention Enlèvement d’enfants de 1980. Cet article prévoit la possibilité pour les autorités d’un État contractant, avant de déposer une demande de retour, d’exiger que le demandeur obtienne, le cas échéant, de la part des autorités de l’État de résidence habituelle de l’enfant, une décision ou autre attestation constatant le caractère illicite du déplacement ou du non‑retour de l’enfant au sens de l’article 3 de la Convention. Les Autorités centrales des États contractants doivent, dans la mesure du possible, aider les demandeurs à obtenir cette décision ou attestation.

Portée du mécanisme de l’article 15 aux fins d’obtention de décisions ou d’attestations

Les États de tradition de common law sont divisés quant au rôle du mécanisme de l’article 15. Ils s’interrogent en particulier quant à la nature de la décision ; le tribunal de l’État de résidence habituelle de l’enfant doit-il statuer sur le caractère illicite du déplacement ou du non-retour ou se contenter d’établir si le demandeur est bel et bien titulaire du droit de garde en vertu du droit interne ? Cette distinction est indissociable de l’interprétation autonome du droit de garde et du caractère « illicite » aux fins de la Convention, autrement dit estime-t-on que le droit de garde a été violé.

Royaume-Uni – Angleterre et Pays de Galles

La Cour d’appel s’est prononcée en faveur d’une position très stricte quant à la portée du mécanisme de l’article 15 :

Hunter v. Murrow [2005] EWCA Civ 976, [2005] 2 F.L.R. 1119 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 809].

La Cour a conclu qu’il était difficile d’envisager des circonstances dans lesquelles une demande aux fins de l’article 15 peut avoir une quelconque utilité, si la demande d’attestation dans l’État requis a trait à un point d’interprétation autonome de la Convention (par ex., le caractère illicite).

Deak v. Deak [2006] EWCA Civ 830 [Référence INCADAT :HC/E/UKe 866].

La Chambre des Lords a néanmoins infirmé cette position dans l’affaire Deak :

Re D. (A Child) (Abduction: Rights of Custody) [2007] 1 AC 619, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880].

Si l’utilité et le caractère contraignant d’une décision d’un tribunal étranger portant sur l’étendue des droits du demandeur ont fait l’unanimité, la Baronne Hale, suivie de Lord Hope et Lord Brown, a insisté sur le fait que le tribunal étranger était bien mieux placé qu’un tribunal anglais pour comprendre les véritables signification et effet de ses propres lois aux termes de la Convention.

Nouvelle-Zélande

Fairfax v. Ireton [2009] NZFLR 433 (NZ CA), [Référence INCADAT : HC/E/NZ 1018].

Se ralliant à la décision de la Cour d’appel anglaise dans l’affaire Hunter v. Morrow, la Cour d’appel néo-zélandaise a conclu, à la majorité, qu’un tribunal saisit d’une demande de décision ou d’attestation aux fins de l’article 15 devrait se contenter de consigner les questions relevant du droit national et ne pas s’aventurer à classer le déplacement comme illicite ou non. Ce dernier point relève exclusivement de la compétence des tribunaux de l’État de refuge, compte tenu de l’interprétation autonome de la Convention.

Statut d’une décision ou attestation de l’article 15

Le statut qu’il convient d’accorder à une décision ou attestation de l’article 15 s’est également révélé source de controverse, en particulier eu égard à la nature ou non probante d’une décision étrangère eu égard à l’existence ou non du droit de garde et quant au caractère illicite.

Australie

In the Marriage of R. v. R., 22 May 1991, transcript, Full Court of the Family Court of Australia (Perth), [Référence INCADAT : HC/E/AU 257];

La Cour a estimé que la décision ou attestation de l’article 15 n’était qu’indicative et qu’il appartenait aux tribunaux français de déterminer si le déplacement était illicite.

Royaume-Uni – Angleterre et Pays de Galles

Hunter v. Murrow [2005] EWCA Civ 976, [2005] 2 F.L.R. 1119, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 809].

La Cour d’appel a jugé que la décision ou attestation de l’article 15 n’était pas probante et a réfuté les conclusions de la Haute Cour néo-zélandaise quant au caractère illicite du déplacement ou du non-retour : M. v. H. [Custody] [2006] NZFLR 623 (HC), [Référence INCADAT : HC/E/UKe 1021]. Ce faisant, elle a indiqué que les tribunaux néo-zélandais ne reconnaissaient pas la distinction entre les droits de garde et d’accès, distinction admise au Royaume-Uni.

Deak v. Deak [2006] EWCA Civ 830, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 866].

La Cour d’appel a refusé les conclusions des tribunaux roumains indiquant que le père ne disposait pas du droit de garde en vertu de la Convention.

La Chambre des Lords a néanmoins infirmé cette position dans l’affaire Deak :

Re D. (A Child) (Abduction: Rights of Custody) [2007] 1 AC 619, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880].

La Chambre des Lords a conclu à l’unanimité qu’en cas de demande de décision ou d’attestation en vertu de l’article 15, la décision du tribunal étranger quant à l’étendue du droit du demandeur doit être, sauf circonstances exceptionnelles (par ex. si la décision résulte d’une fraude ou viole les principes élémentaires de justice), considérée comme probante. Il n’existait en l’espèce aucune circonstance exceptionnelle, le tribunal de première instance et la Cour d’appel ont dont commis une erreur en ne tenant pas compte de la décision de la Cour d’appel de Bucarest et en autorisant la production de nouvelles preuves.

Pour ce qui est de la détermination des droits du parent, la Baronne Hale, suivie de Lord Hope et Lord Brown, a estimé que le tribunal de l’État requis pouvait refuser de s’y conformer, uniquement lorsque cette détermination est clairement contraire à l’interprétation internationale de la Convention, comme cela a pu être le cas dans l’affaire Hunter v. Murrow. Pour sa part, Lord Brown a jugé que la détermination des droits et du caractère illicite devait, en toutes circonstances, être jugée probante.

Suisse

5A_479/2007/frs, Tribunal fédéral, IIè cour civile, 17 octobre 2007, [Référence INCADAT : HC/E/CH 953].

La Cour suprême suisse a jugé qu’une conclusion quant au droit de garde serait, en principe, contraignante pour les autorités de l’État requis. Pour ce qui est des décisions ou attestations de l’article 15, la Cour a indiqué que les avis parmi les commentateurs étaient partagés quant à leurs effets et a refusé de se prononcer sur la question.

Conséquences pratiques d’une décision ou attestation de l’article 15

Le recours au mécanisme de l’article 15 provoquera inéluctablement des retards dans le cadre de la demande de retour, en particulier lorsque la décision ou attestation d’origine fait l’objet d’un appel interjeté par les autorités de l’État de résidence habituelle. Voir par exemple :

Re D. (A Child) (Abduction: Rights of Custody) [2007] 1 AC 619, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880].

Cette réalité pratique a à son tour généré une grande quantité d’opinions de juges.

L’affaire Re D. a suscité de nombreuses opinions. Lord Carswell a affirmé qu’il conviendrait de limiter au minimum le recours à cette procédure. Lord Brown a indiqué qu’un tel mécanisme ne serait utilisé qu’à de rares occasions. Lord Hope a conseillé d’éviter de rechercher la perfection dans l’examen du caractère illicite du déplacement ou du non-retour ; il conviendrait selon lui d’établir un juste milieu entre le fait d’agir sur base d’informations trop faibles et d’en solliciter trop. La Baronne Hale a indiqué qu’en cas d’adhésion récente d’un État à la Convention, l’article 15 pouvait, en cas de doute, s’avérer utile aux fins d’obtention d’une décision contraignante sur le contenu et les effets du droit local.

Nouvelle-Zélande

Fairfax v. Ireton [2009] NZFLR 433 (NZ CA), [Référence INCADAT : HC/E/NZ 1018].

La Cour d’appel a, à la majorité, estimé que les demandes au titre de l’article 15 ne devraient être utilisées que très rarement entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande, compte tenu de la similarité de ces deux ordres juridiques.

Solutions alternatives à une demande aux fins de l’article 15

Dans les cas où les tribunaux souhaitent simplement établir quel est le droit étranger à la lumière des informations disponibles, le recours à un expert en la matière peut apparaître comme une solution de rechange. L’expérience en Angleterre et au Pays de Galles a montré que cette méthode est loin d’être infaillible et qu’elle ne permet pas toujours de gagner du temps, voir :

Re F. (A Child) (Abduction: Refusal to Order Summary Return) [2009] EWCA Civ 416, [2009] 2 F.L.R. 1023, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 1020].

Dans ce dernier cas, le juge Thorpe a émis l’avis que l’on pourrait plus souvent recourir au Réseau judiciaire européen, par l’intermédiaire du Bureau international du droit de la famille au sein de la Royal Courts of Justice. Des conseils pratiques pourraient ainsi être émis quant à la meilleure marche à suivre dans un cas particulier : recourir conjointement à un unique expert ; solliciter une décision ou attestation en vertu de l’article 15 ; solliciter l’opinion d’un juge de liaison concernant le droit de son État, opinion qui ne serait pas contraignante mais qui pourrait aider les parties et le tribunal à distinguer le poids des arguments ou des intentions dans la contestation de la faculté du plaignant à remplir les conditions établies à l’article 3.

Exigence de traitement rapide de la demande (art. 11)

Résumé INCADAT en cours de préparation.