AFFAIRE

Texte complet non disponible

Nom de l'affaire

Zaffino v. Zaffino (Abduction: Children's Views) [2005] EWCA Civ 1012

Référence INCADAT

HC/E/UKe 813

Juridiction

Pays

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles

Nom

Court of Appeal, Civil Division (Cour d'appel, chambre civile) (Angleterre)

Degré

Deuxième Instance

États concernés

État requérant

Canada

État requis

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles

Décision

Date

23 June 2005

Statut

Définitif

Motifs

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2) | Questions procédurales

Décision

Recours accueilli, retour ordonné

Article(s) de la Convention visé(s)

13(2)

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

13(2)

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

Publiée dans

-

INCADAT commentaire

Exceptions au retour

Problèmes généraux
Impact de la Convention sur la fratrie, les demi-frères et les demi-sœurs
Opposition de l’enfant
Exercice d'un pouvoir discrétionnaire

RÉSUMÉ

Résumé disponible en EN | FR

Faits

Les parents étaient mariés et avaient 6 enfants, âgés de 14 ans 3/4, 13 ans, 11 ans 1/2, 10 ans, 7 ans 3/4 et 5 ans 1/2 à la date de leur enlèvement du Canada vers le Royaume-Uni le 21 avril 2005. Dès 2004, la mère avait commencé à envisager de s'installer au Royaume-Uni et y passa du temps. Lors d'un de ses séjours, elle entama une relation avec l'homme avec lequelle elle vivait au moment de l'instance.

A l'automne 2004, la mère saisit une juridiction (Superior Court of Justice) de l'Ontario afin d'être autorisée à s'installer au Royaume-Uni avec quatre de ses enfants. Toutefois, avant d'avoir obtenu satisfaction, elle emmena les enfants au Royaume-Uni.

Le père en demanda le retour. Le 26 mai, la High Court ordonna le retour des deux plus jeunes enfants mais rejeta le retour des ainés, estimant qu'ils avaient l'âge et la maturité suffisants pour que leur opposition soit prise en compte. Le père forma appel de la décision de non-retour de ces derniers.

Dispositif

Appel accueilli et retour ordonné; selon la majorité des juges l'opposition au retour des deux enfants n'aurait pas dû mener à l'application de l'exception de l'article 13 alinéa 2.

Motifs

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)

Les trois juges d'appel parvinrent à la conclusion que les enfants devaient être renvoyés aux Etats-Unis. Toutefois ce sont des considérations distinctes qui les influencèrent. Le juge Thorpe LJ, suivi par le juge Wall LJ, se concentra sur la manière avec laquelle le prmier juge avait usé de son pouvoir d'appréciation après avoir estimé l'article 13 alinéa 2 applicable. Le juge du premier degré s'était basé sur une jurisprudence de la cour d'appel selon lequelle il convenait, sauf facteurs contraires, de respecter l'opposition des enfants. Les juges Thorpe et Wall, se référant à d'autres arrêts ou à d'autres portions des jugements utilisés par le premier juge, estimèrent que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'article 13, un juge doit trouver l'équilibre entre la nature et la force de l'opposition de l'enfant d'un côté et les principes conventionnel et d'intérêt supérieur de l'enfant de l'autre. A cet égard, il importait d'étudier les conséquences potentielles d'une décision discrétionnaire de non-retour. Le juge Wall souliga que les principes conventionnels primaient sur la volonté des enfants. Les mêmes juges étudièrent également la manière avec laquelle le premier juge avait usé de son pouvoir discrétionnaire: il avait traité les deux enfants séparément, en commençant par l'aîné. Le juge Wall estima que les deux enfants n'auraient pas dû être traités séparément. Le juge Thorpe considéra quant à lui que le premier juge aurait dû prendre comme point de départ le fait, qui avait été admis, que la mère rentrerait au Canada avec les deux plus jeunes enfants. Le juge Wall ajouta que le juge du premier degré avait commis une erreur dans son évaluation de l'opposition du plus jeune des enfants. Le juge Thorpe, sans confirmer cette position, estima que l'opposition du plus jeune enfant n'avait pas été traitéé à sa juste valeur. Le juge Neuberger LJ se dit globalement d'accord avec le point de vue de ses confrères sur la question du pouvoir d'appréciation, mais ne considéra pas que le premier juge ait fait une erreur en traitant l'opposition des deux enfants isolément. Pour accueillir le recours, il s'attacha au fait (qu'avait également noté le juge Wall) que ce que souhaitait l'aîné des enfants était de rester avec sa mère et ses jeunes frères et soeurs, ce qui impliquait donc un retour puisque la mère avait d'ores et déjà accepté de rentrer avec les plus jeunes enfants.

Questions procédurales

Il convient d'observer que la demande de retour fut examinée extrêmement rapidement : seuls deux mois s'écoulèrent entre le déplacement illicite et l'audience d'appel.

Commentaire INCADAT

Pour commentaire sur cet arrêt, voir : P. McEleavy, « Evaluating the Views of Abducted Children: Trends in Appellate Case Law » [2008] Child and Family Law Quarterly, pp. 230-254.

Impact de la Convention sur la fratrie, les demi-frères et les demi-sœurs

Résumé INCADAT en cours de préparation.

Exercice d'un pouvoir discrétionnaire

Lorsqu'il est établi qu'un enfant s'oppose à son retour et a un âge et une maturité suffisants pour qu'il soit approprié de tenir compte de son opinion, le tribunal saisi a un pouvoir discrétionnaire pour décider d'ordonner ou non le retour de l'enfant. 

Des approches différentes se sont fait jour quant à la manière dont ce pouvoir discrétionnaire peut être exercé et quant aux différents facteurs à considérer dans ce cadre. 

Australie        
Richards & Director-General, Department of Child Safety [2007] FamCA 65 [Référence INCADAT : HC/E/AU 904]

La Cour d'appel estima que le juge du premier degré n'aurait pas dû considérer qu'il devait y avoir des arguments « clairs et convaincants » pour aller à l'encontre des objectifs de la Convention. La Cour rappela que la Convention prévoyait un nombre limité d'exceptions au retour et que si ces exceptions étaient applicables, la Cour disposait d'un pouvoir discrétionnaire. Il convenait pour cela de s'intéresser à l'ensemble des circonstances de la cause tout en accordant si nécessaire, un poids important aux objectifs de la Convention.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
L'exercice du pouvoir discrétionnaire a causé des difficultés à la Cour d'appel notamment en ce qui concerne les éléments à prendre en compte et le poids qu'il convenait de leur accorder. 

Dans la première décision phare, Re S. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1993] Fam 242 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 87], la Cour d'appel estima que le pouvoir discrétionnaire de refuser le retour immédiat d'un enfant devait être exercé en tenant compte de l'approche globale de la Convention, c'est-à-dire de l'intérêt supérieur de l'enfant à être renvoyé, à moins que des circonstances exceptionnelles existent qui conduisent au refus.

Dans Re R. (Child Abduction: Acquiescence) [1995] 1 FLR 716 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 60], des opinions différentes furent défendues par deux des juges d'appel :

Le juge Balcombe L.J., favorable à une approche relativement flexible quant aux éléments de l'âge et de l'opposition,  défendit l'idée que certes l'importance  à accorder à l'opposition de l'enfant devait varier en fonction de son âge mais qu'en tout état de cause, les objectifs de la Convention devaient être un facteur primordial. 

Le juge Millet L.J., qui soutenait une approche plus stricte des conditions d'application de l'exception - âge et opposition - se prononça en faveur de l'idée que l'opposition de l'enfant devait prévaloir à moins que des éléments contraires, y compris les objectifs de la Convention, doivent primer.

Le troisième juge se rangea à l'opinion du juge Balcombe L.J.

Dans Re T. (Abduction: Child's Objections to Return) [2000] 2 FCR 159 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 270] le juge Ward L.J. suivit l'interprétation du juge Millett L.J.

Le raisonnement de Re. T fut ensuite implicitement suivi par un collège de juges autrement composé de la Cour d'appel :

Re J. (Children) (Abduction: Child's Objections to Return) [2004] EWCA CIV 428, [2004] 2 FLR 64 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 579]

Il fut toutefois rejeté dans l'affaire Zaffino v. Zaffino (Abduction: Children's Views) [2005] EWCA Civ 1012; [2006] 1 FLR 410 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 813].

La jurisprudence anglaise suit désormais l'approche du juge Balcombe L.J.

Dans Zaffino v. Zaffino, la cour estima qu'il convenait également de tirer les conséquences du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant.  Cet intérêt militait en l'espèce en faveur du retour. 

Dans Vigreux v. Michel [2006] EWCA Civ 630, [2006] 2 FLR 1180 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 829] la Cour d'appel considéra comment ce pouvoir discrétionnaire devait s'appliquer dans les affaires régies par le Règlement de Bruxelles II bis. Elle estima que les buts et objectifs du Règlement devaient être pris en compte en plus des objectifs de la Convention. 

Dans Re M. (A Child) (Abduction: Child's Objections to Return) [2007] EWCA Civ 260, [2007] 2 FLR 72 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 901] la Cour suivit l'intérêt de l'enfant et refusa d'ordonner le retour de la fillette de 8 ans qui était en cause. La Cour sembla suivre le commentaire obiter exprimé dans Vigreux selon lequel la décision de ne pas ordonner le retour d'un enfant devait être liée à une dimension « exceptionnelle » du cas.

La dimension exceptionnelle fut discutée dans l'affaire Nyachowe v. Fielder [2007] EWCA Civ 1129, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 964]. Une ordonnance de retour fut prononcée nonobstant l'opposition forte d'une enfant indépendante de 12 ans. En l'espèce le fait que le problème était apparu à l'occasion de vacances de 2 semaines fut un facteur déterminant.

Dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937] la Chambre des Lords affirma qu'il convenait de ne pas importer la notion de caractère exceptionnel dans le cadre de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire ouvert par la Convention. Les circonstances dans lesquelles le retour peut être refusé sont elles-mêmes des exceptions au principe général, ce qui en soi est une dimension exceptionnelle suffisante. Il n'était ni nécessaire ni désirable d'exiger une dimension exceptionnelle supplémentaire.

Le juge Hale ajouta que lorsque la Convention ouvre la porte à un exercice discrétionnaire, ce pouvoir discrétionnaire était illimité. Dans les affaires relevant de l'article 13(2), il appartenait aux juges de considérer la nature et la force de l'opposition de l'enfant, dans quelle mesure cette opposition émane de l'enfant lui-même ou est influencée par le parent ravisseur, et enfin, dans quelle mesure cette opposition est dans le prolongement de l'intérêt supérieur de l'enfant et des objectifs généraux de la Convention. Plus l'enfant était âgé, plus son opposition devait en principe compter.

Nouvelle-Zélande
Les interprétations de Balcombe / Millett donnèrent lieu à des jugements contrastés de la High Court. Toutefois, la Cour d'appel s'exprima en faveur de l'approche de Balcombe dans :

White v. Northumberland [2006] NZFLR 1105 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 902].

Royaume-Uni - Écosse
P. v. S., 2002 FamLR 2 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 963

Dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire d'ordonner le retour, le juge de première instance avait observé que le retour devait être ordonné à moins que de bonnes raisons justifient qu'il soit fait exception à la Convention. Cette position fut approuvée par la cour d'appel, qui estima que l'existence des exceptions ne niait pas le principe général selon lequel les enfants victimes de déplacements illicites devaient être renvoyés.

Singh v. Singh 1998 SC 68 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 197]

La Cour estima que le bien-être de l'enfant était un élément à prendre en compte dans le cadre de  l'exercice du pouvoir discrétionnaire. Le juge ne devait pas se limiter à une simple considération de l'opposition de l'enfant et de ses raisons. Toutefois la Cour décida qu'aucune règle ne pouvait s'appliquer quant à la question de savoir si l'intérêt de l'enfant devait s'entendre de manière large ou faire l'objet d'une analyse détaillée ; cette question relevait du pouvoir discrétionnaire de la cour. 

Dans W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [Référence INCADAT : HC/E/UKs 805], l'instance d'appel estima qu'il convenait de mettre en balance tous les éléments, l'un des éléments en faveur du retour étant l'esprit et l'objectif de la Convention de faire en sorte que la question de la garde soit tranchée dans l'État de la résidence habituelle de l'enfant. 

États-Unis d'Amérique
De Silva v. Pitts, 481 F.3d 1279, (10th Cir. 2007), [Référence INCADAT : HC/E/USf 903

La Cour d'appel tint compte de l'opposition d'un enfant de 14 ans, tirant les conséquences de son intérêt supérieur mais non de l'objectif de la Convention.

France
Une juridiction d'appel modéra la force probante de l'opposition au motif que les enfants avaient vécu longuement avec le parent et sans contact avec le parent victime avant d'être entendus, observant également que les faits dénoncés par les enfants avaient par ailleurs été pris en compte par les autorités de l'État de la résidence habituelle:

CA Bordeaux, 19 janvier 2007, No 06/002739 [Référence INCADAT: HC/E/FR 947].