AFFAIRE

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Nom de l'affaire

Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55 [2008] 1 AC 1288

Référence INCADAT

HC/E/UKe 937

Juridiction

Pays

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles

Nom

House of Lords

Degré

Instance Suprême

États concernés

État requérant

Zimbabwe

État requis

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles

Décision

Date

5 December 2007

Statut

Définitif

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b) | Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2) | Intégration de l'enfant - art. 12(2) | Droits de l'homme - art. 20

Décision

Recours accueilli, retour refusé

Article(s) de la Convention visé(s)

13(1)(a) 13(1)(b) 13(2) 20 12(2)

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

12(2)

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

Publiée dans

-

INCADAT commentaire

Exceptions au retour

Problèmes généraux
Nature limitée des exceptions
Nature discrétionnaire de l'article 13
Risque grave de danger
Risques inhérents à l'État de la résidence habituelle de l'enfant
Opposition de l’enfant
Représentation autonome de l'enfant - article 13(2)
Exercice d'un pouvoir discrétionnaire
Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Intégration de l'enfant
Intégration de l'enfant
Dissimulation de l'enfant
Principe de la suspension équitable du délai de prescription (« equitable tolling »)
Pouvoir d'ordonner le retour nonobstant l'intégration

RÉSUMÉ

Résumé disponible en EN | FR

Faits

La demande concernait deux filles âgées de 13 et 10 ans à la date de l'audience. Les parents étaient mariés mais s'étaient séparée début 2001, la mère s'installant alors à l'étranger et laissant ses filles à la garde du père.

En décembre 2004, la mère rentra au Zimbabwe et eut des contacts périodiques avec ses enfants. En mars 2005, la mère enleva les enfants, les emmenant en Angleterre via le Mozambique, le Malawi et le Kenya. A son arrivée à Heathrow, la mère, munie d'un passeport du Malawi, demanda l'asile. Sa demande fut rejetée mais un recours était encore en cours au moment de l'audience dans la procédure de retour.

Le père ne découvrit ses droits conventionnels que fin 2006. Des retards administratifs expliquent que sa demande ne fut pas introduite devant la High Court avant mai 2007.

Le 19 juin, la High Court ordonna le retour des enfants. Elle constata que les enfants s'opposaient à leur retour et avaient un âge et une maturité justifiant que leur opposition soit prise en compte, et également qu'elles s'étaient intégrées à leur nouveau milieu, mais la High Court décida néanmoins de faire usage de son pouvoir discrétionnaire pour ordonner le retour.

La mère forma appel de cette décision mais fut déboutée au motif que le premier juge avait à bon droit décidé discrétionnairement d'ordonner le retour : Re M (Children) [2007] EWCA Civ 992 [Référence INCADAT : HC/E/ UKe 936]. Le 24 octobre la mère obtint l'autorisation de former une recours devant la Chambre des Lords.

Dispositif

Recours accueilli et demande de retour rejetée ; le déplacement était illicite mais les enfants s'étaient intégrées dans leur nouveau milieu et s'opposaient à leur retour - la Cour décida discrétionnairement de ne pas ordonner le retour.

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b)

La Baronne Hale décida qu'il n'y avait pas lieu d'infirmer la conclusion du juge quant à l'article 13 alinéa 1 b. Le père était capable de subvenir aux besoins des enfants en dépit de la situation actuelle difficile du Zimbabwe. Selon la mère le climat moral et politique du Zimbabwe était tel qu'un retour exposait les enfants à un risque grave de danger psychique ou à une situation intolérable. Cet argument fut rejeté.

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)

La Baronne Hale recommanda que les enfants bénéficient d'une représentation séparée dans les affaires où la question de leur intégration se posait.

Intégration de l'enfant - art. 12(2)

La question principale pour la Chambre des Lords concernait l'existence d'un pouvoir discrétionnaire de prononcer le retour en cas d'intégration de l'enfant. Si ce pouvoir existait, à quels principes était-il soumis? Par une majorité de 4 à 1, la Chambre des Lords décida que l'article 12 admettait qu'un enfant intégré dans son nouveau milieu puisse faire l'objet d'une ordonnance de retour. Pour la Baronne Hale, les termes “shall...unless” ("doit... à moins que") de l'article 12 permettaient une telle interprétation. Elle ajouta que cette approche était cohérente avec l'approche utilisée dans les autres exceptions (art 13 & 20) et éviterait qu'il soit nécessaire d'engager d'autres procédures dans le cas inhabituel où le retour immédiat restait approprié en dépit de l'intégration. Cette interprétation reconnaissait la flexibilité du concept d'intégration, qui pouvait intervenir dans une grande variétés de situations et à des degrés divers et permettait de reconnaître que les demandes de retour tardives pouvaient s'expliquer par le fait que le parent rapteur avait caché l'enfant. Une telle interprétation permettait de laisser toutes les options ouvertes à la cour saisie de la demande. Pour Lord Hope, l'impossibilité d'ordonner le retour d'un enfant intégré pouvait emporter le risque que les autorités judiciaires ou administratives agissent dans un sens contraire à l'intérêt de l'enfant. Si telle avait été l'intention des rédacteurs de la Convention, une telle approche aurait probablement été explicitée. En l'absence de disposition expresse, il convenait de considérer que le tribunal possédait un pouvoir discrétionnaire d'ordonner le retour. Lord Rodger était cependant en désaccord avec ce dernier point, estimant q'une fois qu'un enfant était reconnu comme intégré, l'objectif de retour immédiat la Convention ne pouvait plus être atteint, de sorte que la Convention cessait d'être applicable. Si une ordonnance de retour était prononcée, cela devait être en application du droit interne. Exercice du pouvoir discrétionnaire La Baronne Hale, au nom de la Chambre des Lords, indiqua comment ce pouvoir discrétionnaire devait être exercé dans les affaires d'enlèvement d'enfant. D'abord, analysant la jurisprudence existente, elle conclut qu'un critère additionnel du 'caractère exceptionnel' avait été progressivement développé en la matière. Elle affirma qu'une telle approche devait être rejetée dans la mesure où les circonstances dans lesquelles le retour est refusé étaient elles-mêmes des exceptions au principe général du retour. Le caractère exceptionnel était donc inhérent au mécanisme; il n'était ni utile ni désirable d'importer une exigence supplémentaire. S'agissant des affaires ne relevant pas de la Convention, elle rejeta l'idée que les jurisidictions devaient considérer le fond de l'affaire. Il convenait au contraire de faire un choix, en fonction des circonstances, entre une procédure sommaire conduisant au retour ou une procédure plus approfondie. S'agissant des affaires relevant du champ d'application de la Convention, elle considéra que la situation était différente: outre l'intérêt des enfants en cause, il convenait de tenir compte de plusieurs principes généraux, l'objectif de retour immédiat des enfants enlevés mais également la courtoisie internationale, le respect mutuel pour les procédures menées dans les Etats contractants et l'importance de la prévention des enlèvements. Elle ajouta que lorsque la Convention permettait l'usage de discrétion, le pouvoir était illimité: la juridiction pouvait tenir compte des divers principes sous-tendant la Convention, des circonstances de l'affaire et d'éléments liés aux droits et au bien-être de l'enfant. Dans certains cas, les principes conventionnels étaient amenés à primer, dans d'autres cas non. De même, la question de savoir dans quelle mesure le bien-être de l'enfant devait faire l'objet d'une analyse appelait une réponse variable selon les cas, étant observé que plus on était loin d'un retour immédiat tel que l'envisageait la Convention, moins les principes conventionnels devaient avoir d'importance. La Baronne Hale discuta ensuite la question de l'exercice du pouvoir discrétionnaire dans le cadre des différentes exceptions 13(1)(b) Risque grave Elle réitéra l'approche qu'elle avait exprimée dans Re D (Abduction: Rights of Custody) [2006] UKHL 51; [2007] 1 AC 619, [INCADAT : HC/E/ UKe 880] : il était inconcevable qu'un enfant soit renvoyé si son retour l'exposait effectivement à un risque grave. 13(1)(a) Consentement et acquiescement En la matière elle estima que les considérations générales de courtoisie et de confiance mutuelle, ajoutées à des considérations particulières concernant à la rapidité de la procédure et la position des juridictions de l'Etat requérant face à des demandes d'installation à l'étranger avec l'enfant, comme à des considérations individuelles concernant l'enfant en cause, pouvaient tendre vers un retour immédiat afin que l'avenir de l'enfant fût décidé par les juridictions de sa résidence habituelle. 13(2) Opposition de l'enfant En cas d'opposition de l'enfant au retour, les éléments à prendre en compte par la juridiction saisie devaient être encore plus nombreux. Parmi eux: la nature et la force de l'opposition, la mesure dans laquelle cette opposition était vraiment personnelle ou le fait d'une influence parentale, la question de savoir si cette opposition coincidait avec d'autres éléments liés au bien-être de l'enfant ou pertinents au regard des objectifs conventionnels. Plus l'enfant était âgé, plus son opposition avait de poids, ce qui ne voulait pas dire que l'opposition n'était prise en compte que dans les situations les plus exceptionnelles. 12(2) Intégration La Baronne Hale observa qu'en cas d'intégration; l'objectif de retour immédiat ne pouvait pas être atteint; il ne pouvait plus être présumé que le pays le mieux placé pour résoudre le litige au fond était le pays d'origine. Dès lors, les principes sous-tendant la Convention ne menaient pas nécessairement à un retour. Elle conclut que les objectifs conventionnels ne conduisaient pas systématiquement dans la même direction et devaient être analysés en fonction des circonstances et de l'interêt de l'enfant. Elle observa que la Convention avait trouvé un équilibre simple, sensé et nuancé entre les divers éléments à prendre en compte, lesquels tendaient tous à servir l'intérêt supérieur de l'enfant en prévenant ou en résolvant les enlèvements. Il n'était pas nécesaire de compléter ces dispositions par des exigences ou des grilles de lecture supplémentaires. Ayant admis que le premier juge avait appliqué une interprétation trop restrictive dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, la Baronne Hale se demanda quelle solution devait être prononcée. Elle envisagea l'intégration du point de vue des enfants et observa qu'elles s'estimaient intégrées et souhaitaient rester dans leur milieu d'adoption. Le caractère incertain et volatile de la situation du Zimbabwe devait également être pris en compte. Elle estima qu'en comparaison, les objectifs conventionnels étaient de peu de poids et qu'il convenait de ne pas sacrifier le bien-être des enfants sur l'autel de la prévention mondiale des enlèvements. Dès lors le recours de la mère fut accueilli et le retour des enfants refusé.

Droits de l'homme - art. 20

La Baronne Hale refusa de suivre les allégations concernant l'article 20 et la CEDH. Elle estima que renvoyer les enfants contre leur gré emporterait une plus grande violation de leurs droits que le rejet de la demande de retour ne représenterait pour le père. Le calcul comparatif de la proportionalité de l'ingérence dans les droits du père d'un côté et de la mère et les enfants de l'autre conduisait au même résultat.

Commentaire INCADAT

Nature limitée des exceptions

Analyse de la jurisprudence de la base de données INCADAT en cours de préparation.

Nature discrétionnaire de l'article 13

Selon les termes de l'article 13, il est clair que lorsque les conditions d'application d'une exception sont établies, le non-retour n'est pas forcément ordonné : le tribunal saisi de la demande de retour a un pouvoir discrétionnaire.

Ce pouvoir discrétionnaire a été étudié très en détail par une toute récente décision de la juridiction suprême britannique, la Chambre des Lords, dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].

Dans cette affaire, le juge Hale a affirmé qu'il convenait de rejeter toute mention d'exception lors de l'exercice du pouvoir discrétionnaire en vertu de la Convention de La Haye,  dans la mesure où les circonstances dans lesquelles le retour pourrait être refusé sont elles-mêmes des exceptions au principe général du retour. Le caractère exceptionnel étant donc inhérent au mécanisme; il n'était ni utile ni désirable d'importer une exigence supplémentaire.

Dans l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire, il convenait pour les juges de prendre en compte, outre l'intérêt des enfants en cause, plusieurs principes généraux, l'objectif de retour immédiat des enfants enlevés mais également la courtoisie internationale, le respect mutuel pour les procédures menées dans les États contractants et l'importance de la prévention des enlèvements. Une juridiction pouvait tenir compte des divers principes sous-tendant la Convention, des circonstances de l'affaire et d'éléments liés aux droits et au bien-être de l'enfant. Dans certains cas, les principes conventionnels étaient amenés à primer, dans d'autres cas non.

La nature discrétionnaire des exceptions se rencontre le plus fréquemment dans le contexte de l'article 13(2) (opposition d'un enfant mûr), mais il existe également des exemples de demandes de retour auxquelles il a été fait droit nonobstant l'établissement d'exceptions supplémentaires.


Consentement

Australie
Kilah & Director-General, Department of Community Services [2008] FamCAFC 81 [Référence INCADAT : HC/E/AU 995] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re D. (Abduction: Discretionary Return) [2000] 1 FLR 24 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 267].


Acquiescement

Nouvelle-Zélande
U. v. D. [2002] NZFLR 529 [Référence INCADAT : HC/E/NZ @472@].

Risque Grave

Nouvelle-Zélande
McL. v. McL., 12/04/2001, transcript, Family Court at Christchurch (New Zealand) [Référence INCADAT : HC/E/NZ @538@].

Il convient de noter que dans l'arrêt de la cour d'appel anglaise Re D. (Abduction: Rights of Custody) [2006] UKHL 51; [2007] 1 AC 619, [Référence INCADAT : HC/E/ UKe @880@] le juge Hale avait estimé qu'il était inconcevable d'ordonner le retour d'un enfant si un risque grave de danger était établi.

Risques inhérents à l'État de la résidence habituelle de l'enfant

Une exception de l'article 13(1)(b) a parfois été invoquée mettant en cause non pas un risque individuel pour l'enfant mais résultant des conditions de vie dans l'État de la résidence habituelle.

Dans l'arrêt d'appel fameux rendu aux États-Unis d'Amérique dans Friedrich v. Friedrich, 78 F.3d 1060 (6th Cir. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 82], la Cour constata entre autres qu'un risque grave ne pouvait être pris en compte que lorsque le retour est de nature à exposer l'enfant à un danger immédiat pouvant se matérialiser avant la résolution de la question de la garde, par exemple dans le cas où l'enfant est renvoyé dans une zone de guerre ou de famine.

La question s'est notamment posée au regard d'un retour en Israël.

Retour en Israël

La question de savoir si le retour d'enfants en Israël est de nature à les exposer à un risque grave de danger a divisé les tribunaux appelés à se prononcer sur ce point. Une majorité de juridictions a considéré que ce n'était pas le cas. Voir :

Argentine
A. v. A [Référence INCADAT : HC/E/AR 487]

Australie
Kilah & Director-General, Department of Community Services [2008] FamCAFC 81 [Référence INCADAT : HC/E/AU 995]

Belgique
N° 03/3585/A, Tribunal de première instance de Bruxelles, 17/4/2003 [Référence INCADAT : HC/E/BE 547]

Canada
Docket No 1 F 3709/00; C., 4 décembre 2001, Superior Court of Justice, Ontario, Court File No 01-FA-10575

Danemark
V.L.K., 11. januar 2002, 13. afdeling, B-2939-01, Vestre Landsret; High Court, Western Division [Référence INCADAT : HC/E/DK 519]

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re S. (A Child) (Abduction: Grave Risk of Harm) [2002] 3 FCR 43, [2002] EWCA Civ 908 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 469]

France
CA Aix en Provence, 8 octobre 2002, No de RG 02/14917 [Référence INCADAT : HC/E/FR 509]

Allemagne
1 F 3709/00, Familiengericht Zweibrücken (Family Court), 25 January 2001 [Référence INCADAT: HC/E/DE 392]

États-Unis d'Amérique
Freier v. Freier, 969 F. Supp. 436 (E.D. Mich. 1996) [Référence INCADAT : HC/E/USf 133]

Toutefois, l'argument a été accueilli dans certaines affaires :

Australie
Janine Claire Genish-Grant and Director-General Department of Community Services [2002] FamCA 346 [Référence INCADAT : HC/E/AU 458]

États-Unis d'Amérique
Silverman v. Silverman, 2002 U.S. Dist. LEXIS 8313 [Référence INCADAT : HC/E/USf 481] (voir néanmoins Silverman v. Silverman, 338 F.3d 886 (8th Cir. 2003) [Référence INCADAT : HC/E/US 530]

Retour au Zimbabwe

La Chambre des Lords britannique, instance suprême du Royaume-Uni a rejeté l'argument selon lequel le climat politique et moral était tel au Zimbabwe que le retour d'enfants dans ce pays serait de nature à les exposer à un risque grave de danger psychologique ou à une situation intolérable.

Re M. (Abduction: Zimbabwe) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937].

Retour au Mexique

CA Rennes, 28 juin 2011, No de RG 11/02685 [Référence INCADAT : HC/E/FR 1129]

La mère citait la pollution existant à Mexico, l'insécurité générée par la délinquance dans la métropole de Mexico ainsi que les risques sismiques. Toutefois elle ne montrait pas en quoi ces risques touchaient personnellement et directement les enfants. Elle n'avait pas mentionné ces facteurs pour justifier son choix de s'établir en France dans un document adressé au père en 2010, mais avait fait état de difficultés financières et familiales. En outre, la Cour nota que ces facteurs ne l'avaient pas dissuadé de vivre à Mexico de 1998 à 2010 et d'y avoir élevé deux enfants. Elle releva encore que la mère n'avait pas cru opportun de demander l'autorisation aux autorités mexicaines de s'établir en France avec les enfants, sans expliquer les raisons qui, selon elle, pourraient compromettre son droit à un procès équitable au Mexique.

La Cour clarifia qu'elle n'affirmait pas que les éléments soulevés par la mère étaient dénués de fondement. Ils pourraient être éventuellement utilisés dans le cadre de la question de la garde, mais ne suffisaient pas à établir l'existence d'un risque grave de danger.

(Auteur du résumé : Peter McEleavy, Avril 2013)

Représentation autonome de l'enfant - article 13(2)

Représentation autonome de l'enfant - ARTICLE 13(2)

On constate une absence d'uniformité dans les États de langue anglaise quant à la question de la représentation autonome des enfants à la procédure. 

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Dans des décisions anciennes rendues par la Cour d'appel on considérait qu'étant donné le caractère sommaire de la procédure relative à la Convention, une représentation séparée des enfants en cause ne devait être admise que dans des cas exceptionnels.

Re M. (A Minor) (Child Abduction) [1994] 1 FLR 390, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 56] ;

Position reprise dans :

Re H. (A Child: Child Abduction) [2006] EWCA Civ 1247, [2007] 1 FLR 242 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 881] ;

Re F. (Abduction: Joinder of Child as Party) [2007] EWCA Civ 393, [2007] 2 FLR 313 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 905].

Le critère des circonstances exceptionnelles fut admis dans les affaires suivantes :

Re M. (A Minor) (Abduction: Child's Objections) [1994] 2 FLR 126, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 57] ;

Re S. (Abduction: Children: Separate Representation) [1997] 1 FLR 486, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 180] ;

Re H.B. (Abduction: Children's Objections) (No. 2) [1998] 1 FLR 564, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 168] ;

Re J. (Abduction: Child's Objections to Return) [2004] EWCA CIV 428, [2004] 2 FLR 64 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 579] ;

Vigreux v. Michel [2006] EWCA Civ 630, [2006] 2 FLR 1180 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 829] ;

Nyachowe v. Fielder [2007] EWCA Civ 1129, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 964].

Dans Re H. (A Child) [2006] EWCA Civ 1247, [2007] 1 FLR 242,  [Référence INCADAT : HC/E/UKe 881]; le juge Thorpe L.J. estima que les exigences avaient été rendues plus strictes par le Règlement de Bruxelles II bis, dans la mesure où elles concernaient les demandes relatives au statut des parties.

Cette position fut rejetée par le juge Hale :

Sans toutefois remettre en cause le critère des circonstances exceptionnelles, le juge Hale de la Chambre des Lords signala dans l'affaire Re D. (A Child) (Abduction: Foreign Custody Rights) [2006] UKHL 51, [2007] 1 A.C. 619 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880] la nécessité de revoir la manière dont la position des enfants en cause est recherchée, à la lumière des exigences du nouveau régime communautaire de l'enlèvement d'enfants. En particulier elle souligna l'importance de rechercher si l'enfant s'oppose à son retour dès le début de la procédure afin d'éviter des retards.

Dans Re F. (Abduction: Joinder of Child as Party) [2007] EWCA Civ 393, [2007] 2 FLR 313, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 905] le juge Thorpe L.J. reconnut que le Règlement de Bruxelles II bis ne rendait pas plus strictes les exigences en matière de statut des parties ; il rejeta également l'idée que Re D. assouplissait ces exigences.

Toutefois, dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe @937@] le juge Hale intervint de nouveau dans ce débat pour affirmer qu'un juge de la mise en état devait évaluer si une représentation autonome de l'enfant était de nature à permettre à la cour de gagner tant en compréhension que cela pourrait justifier l'intrusion, le retard et le coût qu'un tel statut entraînerait. Une telle approche semble suggérer un critère plus flexible, cependant elle ajouta également que les enfants ne doivent pas avoir une impression exagérée de l'importance et de la pertinence de leur opinion, précisant qu'en général, ceux-ci ne devraient pas intervenir en tant que parties. 

Australie
La cour suprême d'Australie a tenté de se départir du critère des circonstances exceptionnelles dans l'affaire De L. v. Director General, New South Wales Department of Community Services and Another, (1996) 20 Fam LR 390, [Référence INCADAT : HC/E/AU 93].

Toutefois, l'exigence de circonstances exceptionnelles fut rétablie par le législateur dans le cadre d'une réforme du droit de la famille en 2000. Voir : Family Law Amendment Act 2000, et Family Law Act 1975, s. 68L.

Voir:
State Central Authority & Quang [2009] FamCA 1038, [Référence INCADAT: HC/E/AU 1106].

France
En France, les enfants entendus dans le cadre de l'article 13(2) peuvent être assistés d'un avocat (art 338-5 NCPC et art 388-1 Code Civil - cette dernière disposition précise cependant que l'audition assistée d'un avocat ne leur confère pas le statut de partie à la procédure). Voir :

Cass Civ 1ère 17 Octobre 2007, [Référence INCADAT : HC/E/FR 946];

Cass. Civ 1ère 14/02/2006, [Référence INCADAT : HC/E/FR 853].

En Écosse et en Nouvelle-Zélande, on constate que les tribunaux admettent plus facilement qu'un enfant soit représenté séparément à la procédure. Voir par exemple :

Royaume-Uni - Écosse
C. v. C. [2008] CSOH 42, [Référence INCADAT : HC/E/UKs @962@];

M Petitioner 2005 SLT 2, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 804];

W. v. W. 2003 SLT 1253, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 508];

Nouvelle-Zélande
K.S v. L.S [2003] 3 NZLR 837, [Référence INCADAT : HC/E/NZ 770];

B. v. C., 24 December 2001, High Court at Christchurch (New Zealand), [Référence INCADAT : HC/E/NZ 532].

Exercice d'un pouvoir discrétionnaire

Lorsqu'il est établi qu'un enfant s'oppose à son retour et a un âge et une maturité suffisants pour qu'il soit approprié de tenir compte de son opinion, le tribunal saisi a un pouvoir discrétionnaire pour décider d'ordonner ou non le retour de l'enfant. 

Des approches différentes se sont fait jour quant à la manière dont ce pouvoir discrétionnaire peut être exercé et quant aux différents facteurs à considérer dans ce cadre. 

Australie        
Richards & Director-General, Department of Child Safety [2007] FamCA 65 [Référence INCADAT : HC/E/AU 904]

La Cour d'appel estima que le juge du premier degré n'aurait pas dû considérer qu'il devait y avoir des arguments « clairs et convaincants » pour aller à l'encontre des objectifs de la Convention. La Cour rappela que la Convention prévoyait un nombre limité d'exceptions au retour et que si ces exceptions étaient applicables, la Cour disposait d'un pouvoir discrétionnaire. Il convenait pour cela de s'intéresser à l'ensemble des circonstances de la cause tout en accordant si nécessaire, un poids important aux objectifs de la Convention.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
L'exercice du pouvoir discrétionnaire a causé des difficultés à la Cour d'appel notamment en ce qui concerne les éléments à prendre en compte et le poids qu'il convenait de leur accorder. 

Dans la première décision phare, Re S. (A Minor) (Abduction: Custody Rights) [1993] Fam 242 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 87], la Cour d'appel estima que le pouvoir discrétionnaire de refuser le retour immédiat d'un enfant devait être exercé en tenant compte de l'approche globale de la Convention, c'est-à-dire de l'intérêt supérieur de l'enfant à être renvoyé, à moins que des circonstances exceptionnelles existent qui conduisent au refus.

Dans Re R. (Child Abduction: Acquiescence) [1995] 1 FLR 716 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 60], des opinions différentes furent défendues par deux des juges d'appel :

Le juge Balcombe L.J., favorable à une approche relativement flexible quant aux éléments de l'âge et de l'opposition,  défendit l'idée que certes l'importance  à accorder à l'opposition de l'enfant devait varier en fonction de son âge mais qu'en tout état de cause, les objectifs de la Convention devaient être un facteur primordial. 

Le juge Millet L.J., qui soutenait une approche plus stricte des conditions d'application de l'exception - âge et opposition - se prononça en faveur de l'idée que l'opposition de l'enfant devait prévaloir à moins que des éléments contraires, y compris les objectifs de la Convention, doivent primer.

Le troisième juge se rangea à l'opinion du juge Balcombe L.J.

Dans Re T. (Abduction: Child's Objections to Return) [2000] 2 FCR 159 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 270] le juge Ward L.J. suivit l'interprétation du juge Millett L.J.

Le raisonnement de Re. T fut ensuite implicitement suivi par un collège de juges autrement composé de la Cour d'appel :

Re J. (Children) (Abduction: Child's Objections to Return) [2004] EWCA CIV 428, [2004] 2 FLR 64 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 579]

Il fut toutefois rejeté dans l'affaire Zaffino v. Zaffino (Abduction: Children's Views) [2005] EWCA Civ 1012; [2006] 1 FLR 410 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 813].

La jurisprudence anglaise suit désormais l'approche du juge Balcombe L.J.

Dans Zaffino v. Zaffino, la cour estima qu'il convenait également de tirer les conséquences du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant.  Cet intérêt militait en l'espèce en faveur du retour. 

Dans Vigreux v. Michel [2006] EWCA Civ 630, [2006] 2 FLR 1180 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 829] la Cour d'appel considéra comment ce pouvoir discrétionnaire devait s'appliquer dans les affaires régies par le Règlement de Bruxelles II bis. Elle estima que les buts et objectifs du Règlement devaient être pris en compte en plus des objectifs de la Convention. 

Dans Re M. (A Child) (Abduction: Child's Objections to Return) [2007] EWCA Civ 260, [2007] 2 FLR 72 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 901] la Cour suivit l'intérêt de l'enfant et refusa d'ordonner le retour de la fillette de 8 ans qui était en cause. La Cour sembla suivre le commentaire obiter exprimé dans Vigreux selon lequel la décision de ne pas ordonner le retour d'un enfant devait être liée à une dimension « exceptionnelle » du cas.

La dimension exceptionnelle fut discutée dans l'affaire Nyachowe v. Fielder [2007] EWCA Civ 1129, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 964]. Une ordonnance de retour fut prononcée nonobstant l'opposition forte d'une enfant indépendante de 12 ans. En l'espèce le fait que le problème était apparu à l'occasion de vacances de 2 semaines fut un facteur déterminant.

Dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937] la Chambre des Lords affirma qu'il convenait de ne pas importer la notion de caractère exceptionnel dans le cadre de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire ouvert par la Convention. Les circonstances dans lesquelles le retour peut être refusé sont elles-mêmes des exceptions au principe général, ce qui en soi est une dimension exceptionnelle suffisante. Il n'était ni nécessaire ni désirable d'exiger une dimension exceptionnelle supplémentaire.

Le juge Hale ajouta que lorsque la Convention ouvre la porte à un exercice discrétionnaire, ce pouvoir discrétionnaire était illimité. Dans les affaires relevant de l'article 13(2), il appartenait aux juges de considérer la nature et la force de l'opposition de l'enfant, dans quelle mesure cette opposition émane de l'enfant lui-même ou est influencée par le parent ravisseur, et enfin, dans quelle mesure cette opposition est dans le prolongement de l'intérêt supérieur de l'enfant et des objectifs généraux de la Convention. Plus l'enfant était âgé, plus son opposition devait en principe compter.

Nouvelle-Zélande
Les interprétations de Balcombe / Millett donnèrent lieu à des jugements contrastés de la High Court. Toutefois, la Cour d'appel s'exprima en faveur de l'approche de Balcombe dans :

White v. Northumberland [2006] NZFLR 1105 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 902].

Royaume-Uni - Écosse
P. v. S., 2002 FamLR 2 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 963

Dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire d'ordonner le retour, le juge de première instance avait observé que le retour devait être ordonné à moins que de bonnes raisons justifient qu'il soit fait exception à la Convention. Cette position fut approuvée par la cour d'appel, qui estima que l'existence des exceptions ne niait pas le principe général selon lequel les enfants victimes de déplacements illicites devaient être renvoyés.

Singh v. Singh 1998 SC 68 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 197]

La Cour estima que le bien-être de l'enfant était un élément à prendre en compte dans le cadre de  l'exercice du pouvoir discrétionnaire. Le juge ne devait pas se limiter à une simple considération de l'opposition de l'enfant et de ses raisons. Toutefois la Cour décida qu'aucune règle ne pouvait s'appliquer quant à la question de savoir si l'intérêt de l'enfant devait s'entendre de manière large ou faire l'objet d'une analyse détaillée ; cette question relevait du pouvoir discrétionnaire de la cour. 

Dans W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [Référence INCADAT : HC/E/UKs 805], l'instance d'appel estima qu'il convenait de mettre en balance tous les éléments, l'un des éléments en faveur du retour étant l'esprit et l'objectif de la Convention de faire en sorte que la question de la garde soit tranchée dans l'État de la résidence habituelle de l'enfant. 

États-Unis d'Amérique
De Silva v. Pitts, 481 F.3d 1279, (10th Cir. 2007), [Référence INCADAT : HC/E/USf 903

La Cour d'appel tint compte de l'opposition d'un enfant de 14 ans, tirant les conséquences de son intérêt supérieur mais non de l'objectif de la Convention.

France
Une juridiction d'appel modéra la force probante de l'opposition au motif que les enfants avaient vécu longuement avec le parent et sans contact avec le parent victime avant d'être entendus, observant également que les faits dénoncés par les enfants avaient par ailleurs été pris en compte par les autorités de l'État de la résidence habituelle:

CA Bordeaux, 19 janvier 2007, No 06/002739 [Référence INCADAT: HC/E/FR 947].

Sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Résumé INCADAT en cours de préparation.

Intégration de l'enfant

La notion d'intégration ne fait pas encore l'objet d'une interprétation uniforme. La question se pose notamment de savoir si l'intégration doit s'entendre littéralement ou être interprétée à la lumière des objectifs de la Convention. Dans les États faisant prévaloir la deuxième alternative, la charge de la preuve est plus lourde pour le parent ravisseur et l'exception d'application plus rare.

Parmi les États les plus exigeants en ce qui concerne la preuve de l'intégration de l'enfant, on peut citer :

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re N. (Minors) (Abduction) [1991] 1 FLR 413, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 106] ;
Dans cette espèce, il fut décidé que la notion d'intégration dépassait celle d'adaptation au nouveau milieu. L'intégration implique un élément de relation physique avec une communauté et un environnement. Elle contient un élément émotionnel traduisant la sécurité et la stabilité.

Cannon v. Cannon [2004] EWCA CIV 1330, [2005] 1 FLR 169 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 598].

Pour un commentaire critique de Re N., voir :

L.Collins et al., Dicey, Morris & Collins on the Conflict of Laws: fourteenth edition, London, Sweet & Maxwell, 2006, para. 19 à 121.

Il convient toutefois de noter que plus récemment l'Angleterre a vu se développer une analyse de la notion d'intégration centrée sur l'enfant. On se réfèrera à la décision de la Chambre des Lords dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937]. Cette décision pourrait remettre en cause la jurisprudence antérieure.

Toutefois cette décision n'a apparemment pas affaibli les exigences posées en la matière par la Common Law comme en témoigne Re F. (Children) (Abduction: Removal Outside Jurisdiction) [2008] EWCA Civ. 842, [2008] 2 F.L.R. 1649 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 982].

Royaume-Uni - Écosse
Soucie v. Soucie 1995 SC 134, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 107]

Pour que l'article 12(2) trouve à s'appliquer, il faut que l'intérêt qu'a l'enfant à rester dans son nouveau milieu soit si fort qu'il dépasse l'objectif premier de la Convention selon lequel il appartient au juge du lieu de la résidence habituelle qu'avait l'enfant au moment de l'enlèvement de décider de l'avenir de celui-ci.

P. v. S., 2002 FamLR 2 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 963]

L'intégration existe dans les situations stables, dont on peut s'attendre qu'elles durent. Il convient d'opérer une certaine projection dans l'avenir.

C. v. C. [2008] CSOH 42, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 962]

États-Unis d'Amérique
In re Interest of Zarate, No. 96 C 50394 (N.D. Ill. Dec. 23, 1996), [Référence INCADAT : HC/E/USf  134]

Une interprétation littérale du concept d'intégration a été préférée dans les États suivants :

Australie
Director-General, Department of Community Services v. M. and C. and the Child Representative (1998) FLC 92-829; [Référence INCADAT : HC/E/AU 291];

Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong)
A.C. v. P.C. [2004] HKMP 1238, [Référence INCADAT : HC/E/HK 825]

L'impact de la différence d'interprétation est sans doute plus marqué lorsque ce sont des jeunes enfants qui sont en cause.

Il a été décidé que l'intégration doit s'apprécier du point de vue du jeune enfant en :

Autriche
7Ob573/90 Oberster Gerichtshof, 17/05/1990, [Référence INCADAT : HC/E/AT 378] ;

Australie
Secretary, Attorney-General's Department v. T.S. (2001) FLC 93-063, [Référence INCADAT : HC/E/AU 823] ;

State Central Authority v. C.R. [2005] Fam CA 1050, [Référence INCADAT : HC/E/AU 824] ;

Israël
Family Application 000111/07 Ploni v. Almonit,  [Référence INCADAT : HC/E/IL 938] ;

Monaco
R 6136; M. Le Procureur Général contre M. H. K, [Référence INCADAT : HC/E/MC 510] ;

Suisse
Präsidium des Bezirksgerichts St. Gallen (Cour cantonale de St. Gallen) (Suisse), décision du 8 Septembre 1998, 4 PZ 98-0217/0532N, [Référence INCADAT : HC/E/CH 431].

Une approche centrée sur l'enfant a également été adoptée dans des décisions importantes rendues à propos d'enfants plus grands, l'accent étant mis sur l'opinion de l'enfant.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937];

France
CA Paris 27 Octobre 2005, 05/15032, [Référence INCADAT : HC/E/FR 814];

Québec
Droit de la Famille 2785, Cour d'appel de Montréal, 5 décembre 1997, No 500-09-005532-973 [Référence INCADAT : HC/E/CA 653].

En revanche, c'est une analyse plus objective de l'intégration qui a été préférée aux États-Unis d'Amérique :

David S. v. Zamira S., 151 Misc. 2d 630, 574 N.Y.S. 2d 429 (Fam. Ct. 1991), [Référence INCADAT : HC/E/USs 208];
Les enfants, âgés de 3 ans et 1 an ½ n'avaient pas établi de liens importants dans leur nouveau milieu de Brooklyn. Ils ne participaient pas aux activités scolaires, extrascolaires, religieuses, sociales ou communautaires auxquelles des enfants plus âgés se livrent.

Dissimulation de l'enfant

Lorsque des enfants sont cachés dans l'État de refuge, les juges sont réticents à l'idée de considérer qu'il y a eu intégration, même lorsque de nombreuses années se sont écoulées entre le déplacement et la localisation :

Canada (7 ans entre l'enlèvement et la localisation)
J.E.A. v. C.L.M. (2002), 220 D.L.R. (4th) 577 (N.S.C.A.), [Référence INCADAT :  HC/E/CA 754] ;

Voir cependant la décision de la Cour d'appel de Montréal dans :

Droit de la Famille 2785, Cour d'appel de  Montréal, 5 décembre 1997, No 500-09-005532-973 [Référence INCADAT : HC/E/CA 653].

Royaume-Uni - Écosse (2 ans et demi entre l'enlèvement et la localisation)
C. v. C. [2008] CSOH 42, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 962];

Suisse (4 ans entre l'enlèvement et la localisation)
Justice de Paix du cercle de Lausanne, 6 juillet 2000, J 765 CIEV 112E, [Référence INCADAT : HC/E/CH 434];

États-Unis d'Amérique
(2 ans et demi  entre l'enlèvement et la localisation)
Lops v. Lops, 140 F. 3d 927 (11th Cir. 1998), [Référence INCADAT : HC/E/USf 125] ;

(3 ans entre l'enlèvement et la localisation)
In re Coffield, 96 Ohio App. 3d 52, 644 N.E. 2d 662 (1994), [Référence INCADAT : HC/E/USs 138]. 

Dans certains États, le retour d'enfants a été ordonné alors même qu'ils menaient une vie relativement ouverte en dépit du fait qu'ils étaient recherchés :

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles (4 ans entre l'enlèvement et la localisation)
Re C. (Abduction: Settlement) (No 2) [2005] 1 FLR 938, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 815] ;

Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong) (4 ans 3/4 entre l'enlèvement et la localisation)
A.C. v. P.C. [2004] HKMP 1238, [Référence INCADAT : HC/E/HK 825].

Principe de la suspension équitable du délai de prescription (« equitable tolling »)

L'utilisation de ce principe impose que le calcul du délai d'un an contenu à l'article 12 ne commence qu'à partir du moment où l'enfant a pu être localisé. Un parent ravisseur qui a caché l'enfant pendant plus d'un an pourrait sinon bénéficier d'une exception (qui devrait lui être fermée en principe), et ce, pour la seule raison qu'il s'est comporté de manière inacceptable.

Furnes v. Reeves, 362 F.3d 702 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 578].

Le principe de la suspension équitable du délai de prescription (« equitable tolling ») a été rejeté dans le contexte de l'application de l'article 12(2) par certains États :

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Cannon v. Cannon [2004] EWCA CIV 1330 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 598] ;

Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong)
A.C. v. P.C. [2004] HKMP 1238 [Référence INCADAT : HC/E/HK 825] ;

Nouvelle-Zélande
H.J. v. Secretary for Justice [2006] NZFLR 1005 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 1127].

Pouvoir d'ordonner le retour nonobstant l'intégration

Au contraire de l'exception de l'article 13, l'article 12(2) ne prévoit pas expressément la possibilité pour les juridictions saisies de la demande de retour de disposer d'un pouvoir discrétionnaire pour ordonner le retour en cas d'intégration. Lorsque la question s'est posée, il apparaît néanmoins que les cours ont majoritairement  admis le caractère discrétionnaire de l'application de cette disposition.  La question s'est toutefois posée en des termes très variables :

Australie
La question n'a pas été définitivement résolue mais il semble que la Cour d'appel a sous-entendu le caractère discrétionnaire de l'article 12(2), référence faite à la jurisprudence anglaise et écossaise. Voir :

Director-General Department of Families, Youth and Community Care v. Moore, (1999) FLC 92-841 [Référence INCADAT : HC/E/AU 276].

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
La jurisprudence anglaise déduisait l'existence d'un pouvoir discrétionnaire de l'article 18, voir :

Re S. (A Minor) (Abduction) [1991] 2 FLR 1, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 163];

Cannon v. Cannon [2004] EWCA CIV 1330, [2005] 1 FLR 169 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 598].

Toutefois cette interprétation a été expressément rejetée par la Chambre des Lords dans Re M. (Children) (Abduction: Rights of Custody) [2007] UKHL 55, [2008] 1 AC 1288, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 937]. La majorité des juges estima que l'article 12(2) laissait ouverte la question de savoir si le retour pouvait discrétionnairement être ordonné nonobstant l'intégration. Les juges soulignèrent que l'article 18 ne donne pas un nouveau pouvoir d'ordonner le retour d'un enfant mais se réfère simplement à un pouvoir préexistant en droit interne.

Irlande
Il a été fait référence à la jurisprudence ancienne anglaise et à l'article 18 pour justifier l'existence d'un pouvoir discrétionnaire :

P. v. B. (No. 2) (Child Abduction: Delay) [1999] 4 IR 185; [1999] 2 ILRM 401, [Référence INCADAT : HC/E/IE 391];

Nouvelle-Zélande
En Nouvelle-Zélande, le pouvoir discrétionnaire est prévu par la législation de mise en œuvre de la Convention. Voir :

Secretary for Justice (as the NZ Central Authority on behalf of T.J.) v. H.J. [2006] NZSC 97, [Référence INCADAT : HC/E/NZ 882]

Royaume-Uni - Écosse
Quoique la question n'ait pas été envisagée en détail puisqu'en l'espèce il n'y avait pas eu intégration, il fut suggéré que l'application de l'exception avait un caractère discrétionnaire, référence étant faite à l'article 18.

Soucie v. Soucie 1995 SC 134, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 107]

Parmi les décisions qui n'ont pas usé de pouvoir discrétionnaire dans le cadre de l'application de l'article 12(2), voir :

Australie
State Central Authority v. Ayob (1997) FLC 92-746, 21 Fam. LR 567, [Référence INCADAT : HC/E/AU 232], - ultérieurement discuté;

State Central Authority v. C.R. [2005] Fam CA 1050, [Référence INCADAT : HC/E/AU 824];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re C. (Abduction: Settlement) [2004] EWHC 1245, [2005] 1 FLR 127, (Fam), [Référence INCADAT :  HC/E/UKe 596] - ultérieurement remis en cause;

Chine (Région administrative spéciale de Hong Kong)
A.C. v. P.C. [2004] HKMP 1238, [Référence INCADAT : HC/E/HK 825];

Canada (Québec)
Droit de la Famille 2785, Cour d'appel de Montréal, 5 décembre 1997, No 500-09-005532-973 , [Référence INCADAT : HC/E/CA 653].

L'article 18 n'ayant pas été reproduit dans la loi mettant en œuvre la Convention au Québec, il a été considéré que le juge ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire en cas d'intégration.

Sur l'usage d'un pouvoir discrétionnaire lorsque l'enfant enlevé s'est intégré dans son nouveau milieu, voir :

P. Beaumont et P. McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford, OUP, 1999, p. 204 et seq.

R. Schuz, « In Search of a Settled Interpretation of Art 12(2) of the Hague Child Abduction Convention » Child and Family Law Quarterly, 2008.