AFFAIRE

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Nom de l'affaire

5A_285/2007/frs, IIe Cour de droit civil, arrêt du TF du 16 août 2007

Référence INCADAT

HC/E/CH 955

Juridiction

Pays

Suisse

Nom

Tribunal fédéral, IIè cour de droit civil

Degré

Instance Suprême

États concernés

État requérant

Israël

État requis

Suisse

Décision

INCADAT commentaire

Exceptions au retour

Problèmes généraux
Nature limitée des exceptions

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

L'enfant, un garçon, était né en Israël en juin 2003. Le père s'étant rapproché d'un mouvement religieux (Loubavitch), des difficultés conjugales surgirent à l'automne de la même année puis les parents se séparèrent.

Le 20 juin 2004, un tribunal aux affaires familiales de la région de Tel-Aviv prononça l'interdiction de sortie du territoire de l'enfant. La semaine suivante, il donna la résidence de l'enfant à la mère. Cette décision fut confirmée en novembre 2004: les parents avaient l'autorité parentale conjointe, la mère la résidence et le père un droit de visite.

Le 27 mars 2005, le même tribunal rejeta la demande de levée de l'interdiction de sortie du territoire. Le 24 juin 2005 la mère quitta néanmoins Israël avec l'enfant. Le 29 août 2006, la Justice de paix de Lausanne rejeta la demande de retour du père.

Le 22 mai 2007, la Chambre des tutelles rejeta le recours du père mais renvoya la cause à la justice de paix afin qu'elle examine les mesures susceptibles de rétablir les relations personnelles entre l'enfant et son père. Le père forma un recours devant le Tribunal fédéral.

Dispositif

Le recours a été admis; retour ordonné.

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b)

Le Tribunal indiqua que les exceptions au retour prévues à l'art. 13 de la Convention doivent être interprétées de manière restrictive; le parent auteur de l'enlèvement ne devant tirer aucun avantage de son comportement illégal.

Seuls des risques graves devaient être pris en considération, à l'exclusion de motifs liés aux capacités éducatives des parents, dès lors que la Convention n'avait pas pour but d'attribuer l'autorité parentale. Le danger sur le développement de l'enfant devait être sérieux, le fardeau de la preuve incombant à la personne qui s'oppose au retour de l'enfant.

La Cour cantonale avait observé qu'il s'agissait d'un enfant très jeune qui était sous la garde de la mère, laquelle avait toujours pourvu à son entretien. De son côté, le père vivait dans une communauté religieuse où il n'avait qu'un revenu mensuel de 300 fr. La garde de l'enfant lui avait été retirée en raison du climat de peur qu'il faisait régner au domicile familial. Avant le déplacement de l'enfant en Suisse, le père ne disposait que d'un droit de visite restreint et surveillé.

Se fondant sur le caractère lacunaire et peu rassurant des renseignements fournis sur la situation du père en cas de retour de l'enfant seul et sur une expertise, la Cour cantonale avait considéré qu'un retour en Israël impliquait un risque de danger psychologique pour l'enfant et pouvait le placer dans une situation intolérable, qu'il soit accompagné ou non de sa mère.

Elle a ajouté que, vu les faibles ressources financières du père, un retour en Israël de l'intimée portait également atteinte à la sécurité économique de l'enfant dont la mère devrait retrouver un emploi afin de subvenir à leurs besoins. Le père faisait valoir que tout danger était inexistant si la mère accompagnait l'enfant en Israël, ce qu'on pouvait raisonnablement attendre d'elle.

Le Tribunal fédéral estima qu'on cherchait en vain dans cette décision cantonale la preuve d'un risque grave: la violence du père n'avait pas apparemment menacé l'enfant directement ou non, le père respectait les modalités de son droit de visite et la maigreur de ses revenus était sans pertinence: la question du retour se distinguait en cela de la question de la garde.

Quant à la menace de la mère de ne pas rentrer en Israël, le jugement cantonal ne traitait pas des motifs de ce refus alors qu'il appartenait à la mère d'établir l'existence de circonstances objectives justifiant cette attitude.

Les « risques judiciaires » évoqués étaient vagues (il n'était pas clair si la mère était menacée de prison ferme), et il ne semblait ni pratiquement difficile ni économiquement insupportable pour elle de retourner vivre en Israël. Le Tribunal conclut que l'Autorité cantonale n'aurait pas dû conclure à l'applicabilité de l'exception de risque grave.

Questions procédurales


Le Tribunal fédéral souligna que la loi sur le Tribunal fédéral du 1er janvier 2007 était applicable en l'espèce, la décision attaquée ayant été rendue après son entrée en vigueur. Il indiqua qu'il examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis.

Il ajouta que les décisions statuant sur le retour d'un enfant en application de la Convention ne sont pas des affaires civiles mais des affaires d'entraide administrative entre les Etats contractants liées cependant directement au respect et à la mise en oeuvre du droit civil étranger.

Le Tribunal précisa que, dans le cadre de cette nouvelle loi, la question des frais judiciaires doit être envisagée sous un jour nouveau. Jusqu'alors des frais judiciaires pouvaient être perçus en dépit de l'article 26 de la Convention car il s'agissait d'un recours de droit public, exceptionnel.

Dès lors qu'il est désormais admis que les décisions prises en application de la Convention de La Haye peuvent faire l'objet d'une voie de recours ordinaire (recours civil), il n'y a plus lieu de percevoir de frais judiciaires.

Commentaire INCADAT

Voir aussi la décision du Tribunal fédéral 5F_8/2010, IIe Cour de droit civile, arrêt du TF du 26 mai 2011 [Référence INCADAT: HC/E/CH 1178], ainsi que la décision de la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme dans Neulinger and Shuruk c. Suisse, No 41615/07 [Référence INCADAT : HC/E/ 1323].

Nature limitée des exceptions

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