AFFAIRE

Texte complet non disponible

Nom de l'affaire

CA Orléans, 27 juin 2006, No de RG 06/01084

Référence INCADAT

HC/E/FR 714

Juridiction

Pays

France

Nom

Cour d'appel d'Orléans, Chambre de la Famille

Degré

Deuxième Instance

États concernés

État requérant

États-Unis d'Amérique

État requis

France

Décision

Date

26 June 2006

Statut

Définitif

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b) | Questions procédurales

Décision

-

Article(s) de la Convention visé(s)

12 13(1)(b) 17 19

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

13(1)(b)

Autres dispositions

-

Jurisprudence | Affaires invoquées

-

INCADAT commentaire

Mécanisme de retour

Retour
Retour immédiat

Exceptions au retour

Risque grave de danger
Jurisprudence française

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

La demande concernait trois enfants nés à New York en 1990, 1993 et 1994. A la suite du divorce des parents en 2003, la garde fut attribuée à la mère dont la résidence habituelle était désormais en Californie. Les enfants passaient régulièrement leurs vacances d'été chez leurs grands-parents paternels en France.

A la fin de l'été 2004, la mère décida que les enfants pourraient passer l'année scolaire en France chez leurs grands-parents. Les parents rédigèrent chacun un document transférant toute autorité parentale aux grands-parents « pour l'éducation 2004/05 » . Cet accord fut homologué en mai 2005 par un tribunal californien, précisant qu'à l'issue de l'année scolaire les enfants devraient être renvoyés « rapidement » chez la mère.

Le 15 août 2005, la mère arriva en France pour ramener les enfants. Ils s'opposèrent à leur retour en Californie. Le 9 septembre, la mère demanda le retour des enfants à l'autorité centrale américaine. Le 31 mars 2006, le tribunal d'Orléans estima le non-retour illicite, constata que le retour n'exposait pas les enfants à un risque grave et ordonna donc le retour.

Les grands-parents firent appel de cette décision le 7 avril. Les enfants rentrèrent néanmoins fin avril aux Etats-Unis. Toutefois, les grands-parents maintinrent leur recours et l'avocat général conclut qu'en l'absence de désistement des grands-parents il convenait de mener la procédure dont la cour était saisie à son terme.

Dispositif

Confirmation de la décision de première instance constatant l'illicéité et ordonnant le retour, faute de preuve d'un risque grave. Prise en considération d'une décision de garde américaine et décision que les enfants pourront continuer à résider en France si les grands-parents justifient dans les formes admises soit d'une décision américaine autorisant les enfants à y résider pour une certaine durée soit de l'accord de l'éventuel nouveau détenteur du droit de garde.

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b)


Les grands-parents invoquaient l'intérêt qu'il y avait pour les enfants de parfaire leur formation scolaire en France et de s'y développer harmonieusement. La Cour, rappelant notamment les termes de l'art 19, indiqua toutefois que de telles considérations relèvent de la compétence du juge de la résidence habituelles des enfants et nota d'ailleurs qu'une telle procédure avait été engagée quelques semaines plus tôt.

Les parents dénonçaient également le caractère « abandonnique » de la mère à l'égard des enfants.

La Cour évalua ce risque dans le cadre de l'article 13(1)(b) et estima que ces critiques de la mère relevaient principalement de divergences de conceptions éducatives de personnes issues de cultures et de traditions différentes. Elle rappela par ailleurs que l'article 13 est d'interprétation stricte.

En outre, la Cour décida qu'il existait en Californie une protection judiciaire de la jeunesse comparable à celle dont les enfants étaient susceptibles de bénéficier en France et qu'en cas de danger avéré, il appartenait aux personnes concernées d'engager les actions adéquates dans cet Etat. Enfin, la Cour fit observer que le refus du retour en application de l'article 13 est une simple faculté laissée à l'appréciation du juge.

Questions procédurales


La Cour d'appel rappela les termes de l'article 17 selon lequel le juge peut tenir compte des motifs d'une décision relative à la garde qui rentreraient dans le cadre de l'application de la Convention.

Elle indiqua que les enfants étaient présents à l'audience et que les grands-parents avaient versé aux débats une copie non traduite d'un jugement américain du 15 mai 2006 autorisant les enfants à retourner en France pour y finir l'année scolaire et organisant provisoirement la période subséquente jusqu'à une décision de fond sur la garde.

Commentaire INCADAT

Retour immédiat

Lorsqu'un déplacement ou non-retour est avéré et que moins de 12 mois se sont écoulés au moment de l'introduction de la demande, l'article 12(1) prévoit le retour immédiat de l'enfant. Le but visé est la restauration effective la plus rapide possible de la situation précédant l'enlèvement. Toutefois des questions peuvent parfois se poser au sujet des modalités de retour ou de la concession éventuelle de délais afin de faire des préparatifs ou de permettre à l'enfant de terminer sa session scolaire. La pratique varie sur ce point.

États-Unis d'Amérique
Sampson v. Sampson, 267 Kan. 175, 975 P.2d 1211 (Kan. App. 1999), [Référence INCADAT : HC/E/USs 226

Le tribunal de première instance a donné 90 jours à la mère pour se soumettre avec les enfants à la compétence des tribunaux israéliens.

Dans d'autres cas, le concept de retour « immédiat » d'un enfant déplacé ou retenu illicitement a été interprété bien plus strictement, voir :

France
Procureur de la République c. Bartège, 27 juin 1994, transcript, Cour d'appel de Montpellier [Référence INCADAT : HC/E/FR 63].

Nouvelle-Zélande
Fenton v. Morris, 28 juillet 1995, transcript, New Zealand District Court at Wellington [Référence INCADAT : HC/E/NZ 249].

Royaume-Uni - Écosse
D.I. Petitioner [1999] Green's Family Law Reports 126, [Référence INCADAT : HC/E/UKs 352

Le juge de première instance a estimé que le sens de l'expression « retour immédiat » dépendait des circonstances de l'espèce. Les parties convinrent que le délai initial de deux jours était trop court pour être réaliste et convinrent à la place d'un délai de 7 jours.

Il a également été noté qu'un retour immédiat pourrait ne plus s'avérer approprié lorsque des retards excessifs avaient suivi l'introduction de la procédure de retour :

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re D. (A Child) (Abduction: Foreign Custody Rights) [2006] UKHL 51, [2007] 1 A.C. 619, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880] : près de 4 ans s'étaient écoulés depuis l'arrivée de l'enfant.

Jurisprudence française

Le traitement de l'article 13(1) b) a évolué. L'interprétation permissive initialement privilégiée par les cours a fait place à une interprétation plus stricte.

Les jugements de la plus haute juridiction française, la Cour de cassation, rendus du milieu à la fin des années 1990 contrastent avec la position des juridictions d'appel et des arrêts de cassation plus récents. Voir :

Cass. Civ. 1ère 12 juillet 1994, Rev. Crit. 84 (1995), p. 96 note H. Muir Watt ; JCP 1996 IV 64 note Bosse-Platière, Defrénois 1995, art. 36024, note J. Massip [Référence INCADAT : HC/E/FR 103] ;

Cass. Civ. 1ère 21 novembre 1995 (Pourvoi N° 93-20140), [Référence INCADAT : HC/E/FR 514] ;

Cass. Civ. 1ère 22 juin 1999, (N° de pourvoi : 98-17902), [Référence INCADAT : HC/E/FR 498] ;

Et comparer avec:

Cass. Civ. 1ère 25 janvier 2005 (N° de pourvoi : 02-17411), [Référence INCADAT : HC/E/FR 708] ;

Cass. Civ. 1ère 14 juin 2005 (N° de pourvoi : 04-16942), [Référence INCADAT : HC/E/FR 844] ;

Cass. Civ. 1ère 13 juillet 2005 (N° de pourvoi : 05-10519), [Référence INCADAT : HC/E/FR 845] ;

CA. Amiens 4 mars 1998, n°5704759, [Référence INCADAT : HC/E/FR 704] ;

CA. Grenoble 29 mars 2000 M. c. F., [Référence INCADAT : HC/E/FR 274] ;

CA. Paris 7 février 2002 (N° de pourvoi : 2001/21768), [Référence INCADAT : HC/E/FR 849] ;

CA. Paris, 20/09/2002 (N° de pourvoi : 2002/13730), [Référence INCADAT : HC/E/FR 850] ;

CA. Aix en Provence 8 octobre 2002, L c. Ministère Public, Mme B. et Mesdemoiselles L. (N° de rôle 02/14917) [Référence INCADAT : HC/E/FR 509] ;

CA. Paris 27 octobre 2005, 05/15032 [Référence INCADAT : HC/E/FR 814] ;

Cass. Civ. 1ère 14 décembre 2005 (N° de pourvoi : 05-12934) [Référence INCADAT : HC/E/FR @889@] ;

Cass. Civ. 1ère 14 November 2006 (N° de pourvoi : 05-15692) [Référence INCADAT : HC/E/FR @890@].

Pour des exemples récents où le retour a été refusé sur le fondement de l'article 13(1) b) :

Cass. Civ. 1ère 12 Décembre 2006 (N° de pourvoi : 05-22119) [Référence INCADAT : HC/E/FR @891@] ;

Cass. Civ. 1ère 17 Octobre 2007 [Référence INCADAT : HC/E/FR @946@]. 

L'interprétation donnée à l'article 13(1) b) par la Cour d'appel de Rouen en 2006, quoique simplement obiter, rappelle l'interprétation permissive qui était constante au début des années 1990. Voir :

CA. Rouen, 9 Mars 2006, N°05/04340 [Référence INCADAT : HC/E/FR @897@].