CASE

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Case Name

5A_913/2010, II. zivilrechtliche Abteilung, arrêt du TF du 4 février 2011

INCADAT reference

HC/E/CH 1085

Court

Country

SWITZERLAND

Name

Bundesgericht

Level

Superior Appellate Court

Judge(s)
Hohl (président), Escher,Meyer, Marazzi, von Werdt

States involved

Requesting State

BURKINA FASO

Requested State

SWITZERLAND

Decision

Date

4 February 2011

Status

Final

Grounds

Grave Risk - Art. 13(1)(b) | Issues Relating to Return | Procedural Matters

Order

-

HC article(s) Considered

1 3 5 12 13(1)(b) 26

HC article(s) Relied Upon

13(1)(b) 26

Other provisions
Swiss Federal Act on International Child Abduction and the Hague Conventions on the Protection of Children and Adults (LF-EEA); Swiss Act on the Federal Court (LTF)
Authorities | Cases referred to
BGE 120 II 222; BGE 133 III 584; BGE 133 III 393; BGE 133 II 249; 5P.367/2005 vom 15. November 2005; 5P.199/2006 vom 13. Juli 2006; 5P.380/2006 vom 17. November 2006; BGE 135 I 19; BGE 134 II 244; 5A_105/2009 vom 16. April 2009; 5A_764/2009 vom 11. Januar 2010; 5A_436/2010 vom 8. Juli 2010; BGE 130 III 530; BGE 131 III 334; BGE 133 III 146; SCHMID, Neuere Entwicklungen im Bereich der internationalen Kindesentführungen, in: AJP 2002, S. 1333; BACH/GILDENAST, Internationale Kindesentführung, Bielefeld 1999, Rz. 131; KUHN, Ihr Kinderlein bleibet, so bleibet doch all, in: AJP 1997, S. 1099; BUCHER, L'enfant en droit international privé, Basel 2003, Rz. 471; RASELLI/HAUSAMMANN/MÖCKLI/URWYLER, Ausländische Kinder sowie andere Angehörige, in: Ausländerrecht, Basel 2008, N. 16.164; 5A_105/2009 vom 16. April 2009; Entscheid des Europäischen Gerichtshofes für Menschenrechte (EGMR) Nr. 41615/07 vom 6. Juli 2010 (Fall Neulinger); EGMR Nr. 7548/04 vom 22. Juni 2006 [Bianchi]; EGMR Nr. 39388/05 vom 6. Dezember 2007 [Maumousseau]; EGMR Nr. 49492/06 vom 6. November 2008 [Carlson]; Explanatory Report zum HKÜ von Elisa Pérez-Vera Bundesverfassungsgericht BvR 1206/98 vom 29. Oktober 1998; Oberster Gerichtshof Nr. 5Ob47/09m vom 12. Mai 2009; Oberster Gerichtshof Nr. 2Ob103/09z vom 16. Juli 2009; BEAUMONT/MCELEAVY, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford 1999/2004 PIRRUNG, in: von Staudingers Kommentar zum BGB, Berlin 2009, Vorbem zu Art. 19 EG/BGB, D 71 SIEHR, in: Münchener Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch, Band 10, München 2005, Art. 21 Anh. II, Rz. 73; ZÜRCHER, Kindesentführung und Kindesinteressen, Zürich 2005, S. 100 ff.; PAPE, Internationale Kindesentführung, Frankfurt 2010, S. 77 f; BvR 1075/96 vom 15. August 1996, in: IPrax 1997, S. 125 f; EGMR Nr. 56673/00 vom 29. April 2003 [Iglesias Gil], Rz. 57; Bergmann/Ferid, Internationales Ehe- und Kindschaftsrecht, Loseblattsammlung, für Burkina Faso bearbeitet von Eve Cieslar, Stand 998, S. 11 f.

INCADAT comment

Exceptions to Return

Grave Risk of Harm
Primary Carer Abductions

SUMMARY

Summary available in EN | FR

Faits

L'affaire concernait un enfant de père suisse et de mère camerounaise né en Suisse en 2008. La famille  s'installa en janvier 2010 au Burkina Faso, le père devant y travailler jusqu'à l'été 2011. En août 2010, la mère emmena l'enfant chez sa sœur à Paris, France puis chez son frère puis à Lucerne où ils résident désormais en résidence protégée. La demande de retour du père fut rejetée par le Tribunal supérieur du canton de Lucerne, Suisse en décembre 2010. Le père forma un recours devant le tribunal fédéral.

Dispositif

Recours accueilli, l'exception du risque grave était inapplicable;  affaire renvoyée au Tribunal supérieur du canton de Lucerne afin qu'il soit statué sur les modalités du retour au Burkina Faso.

Motifs

Risque grave - art. 13(1)(b)


Le père faisait valoir que le premier juge qui avait considéré le déplacement illicite mais avait appliqué l'exception du risque grave pour refuser le retour, avait fait une appréciation manifestement inexacte des faits. Le Tribunal estima néanmoins que l'établissement des faits pas le premier juge n'avait pas été arbitraire. En tout état de cause, les éléments considérés comme arbitraires par le père n'avaient pas été décisifs pour l'issue du litige.

Le tribunal de Lucerne avait décidé que le retour de l'enfant l'exposerait à un danger psychologique du fait de sa séparation de sa mère qui était  la personne la plus importante pour l'enfant et dont il ne pouvait pas être exigé qu'elle retourne au Burkina Faso vu la violence du père à son égard.

Le Tribunal fédéral rappela que selon sa jurisprudence, il y a risque grave de danger en cas de retour dans une zone de guerre ou d'épidémie, ou qu'il est sérieusement à craindre que l'enfant fera l'objet d'abus sans que les autorités locales interviennent. En revanche, de simples difficultés d'adaptation ou linguistiques étaient insuffisantes. En outre le Tribunal souligna que la question du retour devait être bien distinguée de la question de la garde de l'enfant en cause, laquelle relève des autorités du pays de la résidence habituelle.

S'agissant de la question de la séparation de sa mère il fallait souligner que l'intolérabilité du retour devait en premier lieu s'apprécier au regard de l'enfant. Selon la jurisprudence et la doctrine majoritaire, la séparation d'un enfant de la personne la plus importante dans sa vie ne représentait pas nécessairement un motif de refus du retour, sauf en ce qui concernait les nourrissons.

C'est ainsi que le Tribunal fédéral avait pu conditionner le retour d'un enfant d'à peine deux ans qui avait été exclusivement élevé par sa mère et connaissait à peine son père au retour de sa mère avec lui. Il n'en allait pas différemment dans le cadre de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CourEDH): la présente affaire ne pouvait se comparer à l'affaire Neulinger - le déplacement de l'enfant était récent et la question se posait de savoir si le retour dans le contexte familier du Burkina Faso  représentait un grave danger pour l'enfant.

Or la CourEDH a constamment considéré que le rétablissement du status quo ante par le biais d'un retour immédiat correspondait en général à l'intérêt supérieur de l'enfant. Cela imposait une interprétation stricte des exceptions et requérait qu'un équilibre soit trouvé entre les droits fondamentaux de l'enfant et de ses parents. Le Tribunal en déduisit que seuls les risques réels et inévitables pouvaient s'opposer au retour d'un enfant illicitement déplacé, en tout cas dans les hypothèses où peu de temps s'était écoulé entre le déplacement et le retour.

En l'espèce on pouvait douter qu'il puisse être exigé de la mère qu'elle retourne au logement familial vu la violence de sa relation avec le père.  Ni l'un ni l'autre parent ne le souhaitaient. Le père proposait de prendre en charge les frais de logement de la mère à proximité du domicile familial mais la mère estimait ne pas pouvoir retourner au Burkina Faso et le tribunal de Lucerne avait considéré qu'un retour de l'enfant seul serait de nature à le traumatiser.

Le Tribunal fédéral décida au contraire que les deux parents étaient capables de s'occuper de l'enfant et l'avaient fait avant le déplacement. La mère n'était pas la seule personne importante pour l'enfant. De la sorte un retour de l'enfant seul pouvait se concevoir (jusqu'à ce qu'à ce qu'il soit statué sur la question de la garde et de la résidence de l'enfant). Le Tribunal fédéral conclut que l'exception de l'article 13(1)(b) de la Convention de La Haye de 1980 n'était donc pas applicable.

Questions liées au retour de l'enfant
Le Tribunal fédéral s'estima dans l'incapacité de décider lui-même de l'exécution du retour. Il était en effet possible que la mère, face à l'ordonnance de retour de l'enfant, décide de rentrer au Burkina Faso avec lui, étant observé que le père paraissait souhaiter le retour de la mère et proposait de subvenir à ses besoins (ce qui correspondait du reste à une obligation légale).

Or si la mère devait rentrer au Burkina Faso, la question de son visa se posait. Le tribunal de Lucerne ne s'était pas prononcé sur ce point. Pourtant aucun visa ne pouvait être délivré si une procédure pénale était ouverte contre la mère. Le père proposait de retirer sa plainte au pénal si l'enfant rentrait au Burkina Faso.

Au vu de tous ces éléments, et du fait que l'adresse de la mère en Suisse lui était inconnue, le Tribunal fédéral décida d'ordonner le retour de l'enfant et de renvoyer l'affaire au tribunal de Lucerne afin que celui-ci statue sur les modalités d'un retour rapide de l'enfant au Burkina Faso.

Questions liées au retour de l'enfant

-

Questions procédurales

Tribunal fédéral et voies de recours :
Le Tribunal fédéral observa que depuis la Loi fédérale sur l'enlèvement international d'enfants et les Conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes (LF-EEA), le tribunal supérieur statue en premier et dernier ressort, le principe du double degré de juridiction n'étant pas applicable en la matière. Il rappela qu'il examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis. Interjeté dans le délai légal de 10 jours contre une décision rendue en dernier ressort, le recours en matière civile était en principe recevable.

Le recours en matière civile pouvait être formé pour violation du droit fédéral et international. Le Tribunal fédéral appliquait le droit d'office sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties. Le Tribunal fédéral ne pouvait en revanche connaître de la violation de droits fondamentaux que si ce grief avait été soulevé et motivé par le recourant.

Le Tribunal fédéral souligna encore qu'il statuait sur la base des faits établis par l'autorité précédente sauf  si ces faits avaient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit ; dans ce cas, la charge de la preuve appartenait à la partie alléguant l'arbitraire.

Frais :
Le Tribunal, rappelant les termes de l'article 26(2)et (4) de la Convention de La Haye de 1980, décida que les avocats de chaque partie recevraient 3 000 CHF de la caisse du Tribunal fédéral.

Auteur du résumé : Aude Fiorini, Royaume-Uni

Commentaire INCADAT

Enlèvements par le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant

La question de la position à adopter dans les situations où le parent ravisseur est le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant, et qu'il menace de ne pas rentrer avec l'enfant dans l'État de résidence habituelle si une ordonnance de retour est rendue, est controversée.

De nombreux États contractants ont adopté une position très stricte au terme de laquelle le jeu de l'exception prévue à l'article 13(1)(b) n'a été retenu que dans des circonstances exceptionnelles quand l'argument tendant au non-retour de l'enfant était invoqué. Voir :

Autriche
4Ob1523/96, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT: HC/E/AT 561]

Canada
M.G. v. R.F., 2002 R.J.Q. 2132 [Référence INCADAT: HC/E/CA 762]

N.P. v. A.B.P., 1999 R.D.F. 38 [Référence INCADAT: HC/E/CA 764]

Dans cette affaire, les circonstances exceptionnelles ont résulté en une ordonnance de non-retour. La mère faisait face à une menace véritable qui lui faisait craindre légitimement pour sa sécurité si elle retournait en Israël. Elle avait été emmenée en Israël sous un faux prétexte, y avait été vendue à la mafia russe puis revendue au père, qui l'avait forcée à se prostituer. Elle avait alors été enfermée, battue par le père, violée et menacée. La mère était dans un réel état de peur, on ne pouvait attendre d'elle qu'elle retourne en Israël. Il aurait été complètement inapproprié de renvoyer l'enfant sans sa mère vers un père qui avait acheté et vendu des femmes, et dirigé des activités de prostitution.

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
C. v. C. (Minor: Abduction: Rights of Custody Abroad) [1989] 1 WLR 654 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 34]

Re C. (Abduction: Grave Risk of Psychological Harm) [1999] 1 FLR 1145 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 269]

Toutefois, dans un jugement plus récent rendu par une Cour d'appel anglaise, la position adoptée en 1989 dans l'affaire C. v. C. fut précisée. Voir :

Re S. (A Child) (Abduction: Grave Risk of Harm) [2002] 3 FCR 43, [2002] EWCA Civ 908 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 469]

Dans cette affaire, il fut décidé que le refus de la mère de retourner dans l'État où l'enfant avait sa résidence habituelle était susceptible de déclencher le jeu de l'exception en ce qu'il n'était pas imputable à un comportement excessif mais à une maladie dont elle souffrait. Il convient de noter qu'une ordonnance de retour fut malgré tout rendue. On peut également mentionner à ce sujet les décisions de la Cour Suprême du Royaume-Uni dans Re E. (Children) (Abduction: Custody Appeal) [2011] UKSC 27, [2012] 1 A.C. 144 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 1068] et Re S. (A Child) (Abduction: Rights of Custody) [2012] UKSC 10, [2012] 2 A.C. 257 [Référence INCADAT: HC/E/UKe 1147]. Dans cette dernière affaire, il fut accepté que les angoisses d'une mère concernant son retour satisfaisaient le niveau de risque requis à l'article 13(1)(b) et justifiaient le jeu de cette exception quoiqu'elles n'étaient pas fondées sur un risque objectif. L'ampleur de ces angoisses était telle qu'elles lui auraient probablement causé des difficultés à assumer normalement son rôle de parent en cas de retour, au point de rendre la situation de l'enfant intolérable.

Allemagne
Oberlandesgericht Dresden, 10 UF 753/01, 21 January 2002 [Référence INCADAT: HC/E/DE 486]

Oberlandesgericht Köln, 21 UF 70/01, 12 April 2001 [Référence INCADAT: HC/E/DE 491]

Auparavant, une position beaucoup plus libérale avait été adoptée :

Oberlandesgericht Stuttgart, 17 UF 260/98, 25 November 1998 [Référence INCADAT: HC/E/DE 323]

Suisse
5P_71/2003/min, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 27 mars 2003 [Référence INCADAT: HC/E/CH 788]

5P_65/2002/bnm, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 11 avril 2002 [Référence INCADAT: HC/E/CH 789]

5P_367/2005/ast, II. Zivilabteilung, arrêt du TF du 15 novembre 2005 [Référence INCADAT: HC/E/CH 841]

5A_285/2007/frs, IIe Cour de droit civil, arrêt du TF du 16 août 2007 [Référence INCADAT: HC/E/CH 955]

5A_479/2012, IIe Cour de droit civil, arrêt du TF du 13 juillet 2012 [Référence INCADAT: HC/E/CH 1179]

Nouvelle-Zélande
K.S. v. L.S. [2003] 3 NZLR 837 [Référence INCADAT: HC/E/NZ 770]

Royaume-Uni - Écosse
McCarthy v. McCarthy [1994] SLT 743 [Référence INCADAT: HC/E/UKs 26]

Etats-Unis d'Amérique
Panazatou v. Pantazatos, No. FA 96071351S (Conn. Super. Ct., 1997) [Référence INCADAT: HC/E/USs 97]

Dans d'autres États contractants, la position adoptée quant aux arguments tendant au non-retour de l'enfant a varié :

Australie
En Australie, la jurisprudence ancienne témoigne d'une position initialement très stricte. Voir :

Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT: HC/E/AU 294]

Director General of the Department of Family and Community Services v. Davis (1990) FLC 92-182 [Référence INCADAT: HC/E/AU 293]

Dans l'affaire State Central Authority v. Ardito, 20 October 1997 [Référence INCADAT: HC/E/AU 283], le Tribunal de Melbourne avait estimé qu'il y avait bien un risque grave de danger alors que la mère refusait de rentrer avec l'enfant. En l'espèce, toutefois, la mère ne pouvait pas retourner aux États-Unis, État de résidence habituelle de l'enfant, car les autorités de ce pays lui refusaient l'entrée sur le territoire.

Plus récemment, suite à la décision de la Cour suprême qui avait été saisie des appels joints dans D.P. v. Commonwealth Central Authority; J.L.M. v. Director-General, NSW Department of Community Services [2001] HCA 39, (2001) 180 ALR 402 [Référence INCADAT: HC/E/AU 346, 347], les tribunaux ont accordé une attention plus particulière à la situation à laquelle l'enfant allait devoir faire face après son retour.

Pour une illustration de ce phénomène dans une affaire où le parent ayant la responsabilité principale de l'enfant refusait de rentrer avec lui dans l'État de sa résidence habituelle, voir : Director General, Department of Families v. RSP. [2003] FamCA 623 [Référence INCADAT: HC/E/AU 544].

France
Dans la jurisprudence française, l'interprétation permissive de l'article 13(1)(b) qui prévalait initialement a été remplacée par une interprétation beaucoup plus stricte. Pour une illustration de l'interprétation permissive initiale. Voir :

Cass. Civ 1ère 12. 7. 1994, S. c. S.. See Rev. Crit. 84 (1995), p. 96 note H. Muir Watt; JCP 1996 IV 64 note Bosse-Platière, Defrénois 1995, art. 36024, note J. Massip [Référence INCADAT: HC/E/FR 103]

Cass. Civ 1ère, 22 juin 1999, No de RG 98-17902 [Référence INCADAT: HC/E/FR 498]

et pour une illustration de l'interprétation plus stricte, voir :

Cass Civ 1ère, 25 janvier 2005, No de RG 02-17411 [Référence INCADAT: HC/E/FR 708]

CA Agen, 1 décembre 2011, No de RG 11/01437 [Référence INCADAT: HC/E/FR 1172]

Israël
Il existe dans la jurisprudence israélienne des exemples contrastés du traitement des exceptions au retour :

Civil Appeal 4391/96 Ro v. Ro [Référence INCADAT: HC/E/IL 832]  contrastant avec :

Family Appeal 621/04 D.Y v. D.R [Référence INCADAT: HC/E/IL 833]

Pologne
Decision of the Supreme Court, 7 October 1998, I CKN 745/98 [Référence INCADAT: HC/E/PL 700]

La Cour Suprême nota qu'il ne serait pas conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant de la priver des soins de sa mère, si celle-ci décidait de rester en Pologne. La Cour affirma cependant que si l'enfant devait rester en Pologne, il serait tout autant contraire à son intérêt d'être privée des soins de son père. Tenant compte de ces considérations, la Cour conclut qu'il ne pouvait pas être présumé qu'ordonner le retour de l'enfant la placerait dans une situation intolérable.

Decision of the Supreme Court, 1 December 1999, I CKN 992/99 [Référence INCADAT: HC/E/PL 701]

La Cour suprême précisa que l'argument fréquemment avancé de la potentielle séparation entre l'enfant et le parent ravisseur ne justifiait pas, en principe, le jeu de l'exception. La Cour jugea qu'en l'absence d'obstacles objectifs au retour du parent ravisseur, on pouvait présumer que celui-ci accordait plus de valeur à ses propres intérêts qu'à ceux de l'enfant.

La Cour ajouta que la crainte pour le parent ravisseur de voir sa responsabilité pénale engagée ne constituait pas un obstacle objectif au retour, puisque celui-ci aurait dû avoir conscience des conséquences de ses actions. La situation était cependant plus compliquée s'agissant des nourrissons. La Cour estima que le lien spécial unissant la mère et le nourrisson ne rendait la séparation possible qu'en cas exceptionnel, et ce même en l'absence d'obstacle objectif au retour de la mère dans l'État de résidence habituelle. La Cour jugea que lorsque la mère d'un nourrisson refusait de revenir avec lui, quelles qu'en soient les raisons, alors le retour devait être refusé sur la base de l'article 13(1)(b). D'après les faits de l'espèce, le retour avait été ordonné.

Uruguay
Solicitud conforme al Convenio de La Haya sobre los Aspectos Civiles de la Sustracción Internacional de Menores - Casación, IUE 9999-68/2010 [Référence INCADAT: HC/E/UY 1185]

Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH)
Il existe des décisions de la CourEDH adoptant une position stricte relativement à la compatibilité des exceptions de la Convention de La Haye avec la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH). Dans certaines de ces affaires, des arguments relatifs à l'exception pour risque grave étaient considérés, y compris lorsque le parent ravisseur indiquait son refus d'accompagner le retour de l'enfant. Voir :

Ilker Ensar Uyanık c. Turquie (Application No 60328/09) [Référence INCADAT: HC/E/ 1169]

Dans cette affaire, la CourEDH confirma un recours du père à qui l'enfant avait été enlevé selon lequel les juridictions turques avaient commis une violation de l'article 8 de la CEDH en refusant d'ordonner le retour de son enfant. La CourEDH jugea que, bien que le très jeune âge d'un enfant soit un critère à prendre en compte dans la détermination de son intérêt, cela ne constituait pas en soi, selon les exigences de la Convention de La Haye, un motif suffisant pour justifier le rejet d'une demande de retour.

Il a parfois été fait recours à des témoignages d'expert afin de faciliter l'évaluation des conséquences potentielles de la séparation entre l'enfant et le parent ravisseur. Voir :

Maumousseau and Washington v. France (Application No 39388/05) of 6 December 2007 [Référence INCADAT: HC/E/ 942]

Lipowsky and McCormack v. Germany (Application No 26755/10) of 18 January 2011 [Référence INCADAT: HC/E/ 1201]

MR and LR v. Estonia (Application No 13420/12) of 15 May 2012 [Référence INCADAT: HC/E/ 1177]

Cependant, il faut également noter que, depuis la décision de la Grande Chambre dans l'affaire Neulinger et Shuruk c Suisse, il est des exemples où une approche moins stricte est suivie. Dans le contexte d'une demande de retour, ce dernier jugement avait placé l'accent sur l'intérêt supérieur de l'enfant enlevé et sur le fait de vérifier que les autorités nationales compétentes avaient conduit un examen détaillé de la situation familiale dans son ensemble ainsi qu'une appréciation équilibrée et raisonnable de tous les intérêts en jeu. Voir :

Neulinger and Shuruk v. Switzerland (Application No 41615/07), Grand Chamber, of 6 July 2010 [Référence INCADAT: HC/E/ 1323]

X. v. Latvia (Application No 27853/09) of 13 December 2011 [Référence INCADAT: HC/E/ 1146]; et décision de la Grand Chamber X. v. Latvia (Application No 27853/09), Grand Chamber [Référence INCADAT: HC/E/ 1234]

B. v. Belgium (Application No 4320/11) of 10 July 2012 [Référence INCADAT: HC/E/ 1171]

Dans cette affaire, la CourEDH estima à la majorité que le retour d'un enfant aux Etats-Unis d'Amérique entrainerait une violation de l'article 8 de la CEDH. Il fut jugé que le processus de prise de décision de la Cour d'appel belge, en ce qui concerne l'article 13(1)(b), n'avait pas satisfait aux exigences procédurales posées par l'article 8 de la CEDH. Les deux juges dissidents notèrent cependant que le danger visé par l'article 13 ne saurait résulter de la seule séparation de l'enfant et du parent ravisseur.

(Auteur: Peter McEleavy, avril 2013)