AFFAIRE

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Nom de l'affaire

Tribunal d'arrondissement de Diekirch, 16 juillet 2013, Référé No 183/2013

Référence INCADAT

HC/E/LU 1307

Juridiction

Pays

Luxembourg

Degré

Première instance

États concernés

État requérant

Portugal

État requis

Luxembourg

Décision

Date

16 July 2013

Statut

Confirmé par l'instance supérieure

Motifs

Droit de garde - art. 3 | Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)

Décision

Retour ordonné

Article(s) de la Convention visé(s)

3 11 12 13(2) 17

Article(s) de la Convention visé(s) par le dispositif

3 13(2)

Autres dispositions
Article 1906(1) de la loi portugaise concernant l'exercice des responsabilités parentales en cas de divorce; Règlement Bruxelles II bis (Règlement (CE) No 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003)
Jurisprudence | Affaires invoquées

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Publiée dans

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INCADAT commentaire

Mécanisme de retour

Droit de garde
La notion de droit de garde au sens de la Convention
Interprétation autonome du « droit de garde » et de « l'illicéité »

Exceptions au retour

Opposition de l’enfant
Âge et maturité requis

RÉSUMÉ

Résumé disponible en FR

Faits

L'affaire concernait deux enfants vivant au Portugal.

Le 19 novembre 2012, lors d'une procédure de divorce entamée entre les parents au Portugal, le Tribunal judiciaire de Soure (Portugal) avait rendu une décision par laquelle la garde des enfants avait été accordé provisoirement à la mère.

Par la même décision le père avait obtenu un droit de visite et d'hébergement à exercer chaque deuxième week-end ainsi que la moitié des vacances scolaires.

Le 3 janvier 2013, la mère quitta le Portugal avec les enfants pour s'installer au Luxembourg, sans avertir le père ou solliciter son accord.

Le père introduisit une demande de retour sur la base de la Convention de La Haye de 1980.

Le juge de première instance qui reçut la demande interrompit les débats afin d'apporter une réponse à la question déterminante qui était de savoir si la garde provisoire qui avait été accordée à la mère par le tribunal de l'État de résidence habituelle avant le déplacement des enfants incluait ou non le droit de prendre seul, et sans solliciter l'accord de l'autre parent, les décisions quant au lieu de résidence des enfants.

Dispositif

Retour ordonné, le déplacement était illicite et aucune des exceptions applicables.

Motifs

Droit de garde - art. 3


Le juge rappela l'objectif de la Convention de La Haye de 1980, qui ne vise pas le fond du droit de garde mais le rétablissement du status quo. Il rappela que la Convention de La Haye reposait sur le principe que la discussion sur le droit de garde contesté devait être engagé devant les autorités compétentes de l'État où l'enfant avait sa résidence habituelle avant le déplacement « cela aussi bien si le déplacement a[vait] eu lieu avant qu'une décision sur la garde ait été rendue que si le déplacement s'[était] produit en violation d'une décision de justice ».  Il souligna qu'il ne lui appartenait pas, étant saisi sur la base de l'article 3 de la Convention, de se prononcer sur les capacités éducatives des deux parents ou sur les circonstances de fait en vue de déterminer le milieu le mieux adapté aux besoins de l'enfant, mais de régler le retour des enfants déplacés ou retenus illicitement en dehors de leur milieu naturel.

Le juge releva que la loi portugaise règlementant les relations entre parents après un divorce stipulait que «  les responsabilités parentales relatives aux questions de particulière importance pour la vie de l'enfant sont exercées en commun par les deux parents conformément à ce qui était en vigueur lors de la constance du mariage, sauf dans les cas d'urgence manifeste, où n'importe quel parent peut agir seul, devant transmettre les renseignements à l'autre dès que possible ». Le juge nota que, si cette disposition règlementait les relations entre parents après le divorce, ceux-ci ne devaient a fortiori pas disposer de prérogatives moins importantes avant la conclusion de la procédure de divorce.

Le juge souligna que la décision concernant le pays dans lequel les enfants allaient résider constituait une question de particulière importance pour ces derniers, et en conclut qu'elle devait donc être prise d'un commun accord par les deux parents. Il releva qu'en l'espèce, le père s'opposait au séjour des deux enfants au Luxembourg, et en conclut qu'il y avait eu violation du droit de garde au sens de la Convention de La Haye et que le déplacement était illicite.

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)
La mère demandait l'audition des enfants.

Le juge constata que les enfants, âgés de 10 et 12 ans, ne disposaient pas du « degré de maturité suffisant pour être en mesure de prendre des décisions indépendantes et réfléchies quant au lieu de leur résidence et ne sauraient dès lors être entendus sur la question de leur retour immédiat ».

Le juge rejeta la demande d'audition des enfants et ordonna le retour au Portugal.

Opposition de l'enfant au retour - art. 13(2)

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Commentaire INCADAT

La notion de droit de garde au sens de la Convention

Les tribunaux d'un nombre très majoritaire d'États considèrent que le droit pour un parent de s'opposer à ce que l'enfant quitte le pays est un droit de garde au sens de la Convention. Voir :

Australie
In the Marriage of Resina [1991] FamCA 33, [Référence INCADAT : HC/E/AU 257];

State Central Authority v. Ayob (1997) FLC 92-746, 21 Fam. LR 567 [Référence INCADAT : HC/E/AU 232] ;

Director-General Department of Families, Youth and Community Care and Hobbs, 24 September 1999, Family Court of Australia (Brisbane) [Référence INCADAT : HC/E/AU 294] ;

Autriche
2 Ob 596/91, 05 February 1992, Oberster Gerichtshof [Référence INCADAT : HC/E/AT 375] ;

Canada
Thomson v. Thomson [1994] 3 SCR 551, 6 RFL (4th) 290 [Référence INCADAT : HC/E/CA 11] ;

La Cour suprême distingua néanmoins selon que le droit de veto avait été donné dans une décision provisoire ou définitive, suggérant que considérer un droit de veto accordé dans une décision définitive comme un droit de garde aurait d'importantes conséquences sur la mobilité du parent ayant la garde physique de l'enfant.

Thorne v. Dryden-Hall, (1997) 28 RFL (4th) 297 [Référence INCADAT : HC/E/CA 12] ;

Decision of 15 December 1998, [1999] R.J.Q. 248 [Référence INCADAT : HC/E/CA 334] ;

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
C. v. C. (Minor: Abduction: Rights of Custody Abroad) [1989] 1 WLR 654, [1989] 2 All ER 465, [1989] 1 FLR 403, [1989] Fam Law 228 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 34] ;

Re D. (A child) (Abduction: Foreign custody rights) [2006] UKHL 51, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880] ;

France
Ministère Public c. M.B. 79 Rev. crit. 1990, 529, note Y. Lequette [Référence INCADAT : HC/E/FR 62] ;

Allemagne
2 BvR 1126/97, Bundesverfassungsgericht, (Federal Constitutional Court), [Référence INCADAT : HC/E/DE 338] ;

10 UF 753/01, Oberlandesgericht Dresden, [Référence INCADAT : HC/E/DE 486] ;

Royaume-Uni - Écosse
Bordera v. Bordera 1995 SLT 1176 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 183];

A.J. v. F.J. [2005] CSIH 36, 2005 1 SC 428 [Référence INCADAT : HC/E/UKs 803].

Afrique du Sud
Sonderup v. Tondelli 2001 (1) SA 1171 (CC), [Référence INCADAT : HC/E/ZA 309].

Suisse
5P.1/1999, Tribunal fédéral suisse, (Swiss Supreme Court), 29 March 1999, [Référence INCADAT : HC/E/CH 427].

États-Unis d'Amérique
Les cours d'appel fédérales des États-Unis étaient divisées entre 2000 et 2010 quant à l'interprétation à donner à la notion de garde.

Elles ont suivi majoritairement la position de la Cour d'appel du second ressort, laquelle a adopté une interprétation stricte. Voir :

Croll v. Croll, 229 F.3d 133 (2d Cir., 2000; cert. den. Oct. 9, 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 313] ;

Gonzalez v. Gutierrez, 311 F.3d 942 (9th Cir 2002) [Référence INCADAT : HC/E/USf 493] ;

Fawcett v. McRoberts, 326 F.3d 491, 500 (4th Cir. 2003), cert. denied 157 L. Ed. 2d 732, 124 S. Ct. 805 (2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 494] ;

Abbott v. Abbott, 542 F.3d 1081 (5th Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 989].

La Cour d'appel du 11ème ressort a néanmoins adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger.

Furnes v. Reeves 362 F.3d 702 (11th Cir. 2004) [Référence INCADAT : HC/E/USf 578].

La question a été tranchée, du moins lorsqu'il s'agit d'un parent demandeur qui a le droit de décider du lieu de résidence habituelle de son enfant ou bien lorsqu'un tribunal de l'État de résidence habituelle de l'enfant cherche à protéger sa propre compétence dans l'attente d'autres jugements, par la Court suprême des États-Unis d'Amérique qui a adopté l'approche suivie à l'étranger.

Abbott v. Abbott (US SC 2010), [Référence INCADAT : HC/E/USf 1029]

La Cour européenne des droits de l'homme a adopté l'approche majoritairement suivie à l'étranger, voir:
 
Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No. 41615/07, 8 January 2009 [Référence INCADAT :HC/E/ 1001].

Décision confirmée par la Grande Chambre: Neulinger & Shuruk v. Switzerland, No 41615/07, 6 July 2010 [Référence INCADAT :HC/E/ 1323].

Droit de s'opposer à un déplacement

Quand un individu n'a pas de droit de veto sur le déplacement d'un enfant hors de son État de residence habituelle mais peut seulement s'y opposer et demander à un tribunal d'empêcher un tel déplacement, il a été considéré dans plusieurs juridictions que cela n'était pas suffisant pour constituer un droit de garde au sens de la Convention:

Canada
W.(V.) v. S.(D.), 134 DLR 4th 481 (1996), [Référence INCADAT :HC/E/CA 17];

Ireland
W.P.P. v. S.R.W. [2001] ILRM 371, [Référence INCADAT :HC/E/IE 271];

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re V.-B. (Abduction: Custody Rights) [1999] 2 FLR 192, [Référence INCADAT :HC/E/UKe 261];

S. v. H. (Abduction: Access Rights) [1998] Fam 49 [Référence INCADAT :HC/E/UKe 36];

Royaume-Uni - Écosse
Pirrie v. Sawacki 1997 SLT 1160, [Référence INCADAT :HC/E/UKs 188].

Cette interprétation a également été retenue par la Cour de justice de l'Union européenne:

Case C-400/10 PPU J. McB. v. L.E., [Référence INCADAT :HC/E/ 1104].

La Cour de justice a jugé qu'une décision contraire serait incompatible avec les exigences de sécurité juridique et la nécessité de protéger les droits et libertés des autres personnes impliquées, notamment ceux du détenteur de la garde exclusive de l'enfant.

Voir les articles suivants :

P. Beaumont et P.McEleavy, The Hague Convention on International Child Abduction, Oxford, OUP, 1999, p. 75 et seq. ;

M. Bailey, « The Right of a Non-Custodial Parent to an Order for Return of a Child Under the Hague Convention », Canadian Journal of Family Law, 1996, p. 287 ;

C. Whitman, « Croll v. Croll: The Second Circuit Limits ‘Custody Rights' Under the Hague Convention on the Civil Aspects of International Child Abduction », Tulane Journal of International and Comparative Law, 2001 , p. 605.

Interprétation autonome du « droit de garde » et de « l'illicéité »

Des conflits se sont parfois fait jour entre des juridictions de plusieurs États contractants traitant des mêmes affaires. Ces conflits se sont particulièrement manifestés dans le cadre de l'interprétation de la notion de droit de garde et de celle de l'illicéité du déplacement ou du non-retour.

Conflits relatifs à la notion de « droit de garde »

Bien que la plupart des États contractants aient adopté une interprétation uniforme de la notion de droit de garde au sens de la Convention, des différences subsistent.

Ainsi en Nouvelle-Zélande, une interprétation très libérale est privilégiée - Gross v. Boda [1995] 1 NZLR 569 [Référence INCADAT : HC/E/NZ 66]. Au contraire, aux États-Unis d'Amérique, c'est une interprétation très restrictive qui prévaut - Croll v. Croll, 229 F.3d 133 (2d Cir., 2000; cert. den. Oct. 9, 2001) [Référence INCADAT : HC/E/USf 313].

De la sorte, lorsqu'une demande de retour concerne des États aux positions différentes, un conflit peut naître quant à la question de savoir si tel parent avait un droit de garde et si le déplacement ou le non-retour était illicite.

Nouvelle-Zélande / Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Hunter v. Murrow [2005] EWCA Civ 976, [2005] 2 F.L.R. 1119 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 809]

La Cour d'appel anglaise rejeta une attestation d'illicéité délivrée par l'État de la résidence habituelle de l'enfant, la Nouvelle-Zélande. Selon la Cour d'appel, le père n'avait pas de droit de garde selon la Convention.

Royaume-Uni - Écosse / États-Unis d'Amérique (Virginie)
Fawcett v. McRoberts, 326 F.3d 491, 500 (4th Cir. 2003), cert. denied 157 L. Ed. 2d 732, 124 S. Ct. 805 (2003) [Référence INCADAT : HC/E/USf 494]

Du point de vue du droit écossais, le déplacement de l'enfant était intervenu en violation d'un droit de garde effectivement exercé. Cette position fut rejetée par la Cour d'appel fédérale du quatrième ressort aux États-Unis.

États-Unis d'Amérique/ Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
Re P. (A Child) (Abduction: Acquiescence) [2004] EWCA CIV 971, [2005] Fam. 293, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 591]

Pour ordonner le retour de l'enfant, la Cour d'appel anglaise décida que le droit que conférait au père une décision new-yorkaise était un droit de garde au sens de la Convention, le fait que ce droit soit ou non caractérisé de droit de garde au sens de la Convention ou au sens du droit new-yorkais commun fédéral ou étatique important peu.

Conflit concernant « l'illicéité »

Royaume-Uni - Angleterre et Pays de Galles
La Cour d'appel a traditionnellement considéré que la question de l'illicéité relevait de la loi du for, le droit de l'État de la résidence habituelle de l'enfant étant sans pertinence.

Re F. (A Minor) (Abduction: Custody Rights Abroad) [1995] Fam 224 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 8]

Alors que le défendeur avait le droit selon la loi en vigueur au Colorado de déplacer unilatéralement l'enfant hors du territoire, la Cour d'appel anglaise considéra le déplacement comme illicite.

Re P. (A Child) (Abduction: Acquiescence) [2004] EWCA CIV 971, [2005] Fam. 293, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 591]

Hunter v. Murrow [2005] EWCA Civ 976, [2005] 2 F.L.R. 1119 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 809]

L'affaire Deak v. Deak [2006] EWCA Civ 830 [Référence INCADAT : HC/E/UKe 866] offre l'exemple le plus extrême de cette jurisprudence, le raisonnement étant appliqué nonobstant une déclaration de l'article 15 contraire.

Toutefois cette décision fut annulée par la Chambre des Lords qui, dans une décision unanime, considéra que si une déclaration de l'article 15 est demandée, alors la cour est liée par le contenu de cette déclaration étrangère, sauf dans des cas exceptionnels où, par exemple, la déclaration a été frauduleusement obtenue ou a été rendue en violation d'un principe de justice naturelle :

Re D. (A child) (Abduction: foreign custody rights) [2006] UKHL 51, [2007] 1 A.C. 619, [Référence INCADAT : HC/E/UKe 880].

Dans d'autres pays, les juridictions ont préféré faire application expresse ou tacite de la loi de la résidence habituelle de l'enfant afin de déterminer l'illicéité du déplacement. Voir :

Australie
S. Hanbury-Brown and R. Hanbury-Brown v. Director General of Community Services (Central Authority) (1996) FLC 92-671, [Référence INCADAT : HC/E/AU 69] ;

Autriche
3Ob89/05t, Oberster Gerichtshof, 11/05/2005 [Référence INCADAT : HC/E/AT 855] ;

6Ob183/97y, Oberster Gerichtshof, 19/06/1997 [Référence INCADAT : HC/E/AT 557] ;

Canada
Droit de la famille 2675, Cour supérieure de Québec, 22 avril 1997, No 200-04-003138-979 [Référence INCADAT : HC/E/CA 666] ;

Allemagne
11 UF 121/03, Oberlandesgericht Hamm, [Référence INCADAT : HC/E/DE 822] ;

2 UF 115/02, Oberlandesgericht Karlsruhe, [Référence INCADAT : HC/E/DE 944] ;

États-Unis d'Amérique
Carrascosa v. McGuire, 520 F.3d 249 (3rd Cir. 2008), [Référence INCADAT : HC/E/USf 970].

Aux États-Unis d'Amérique, la Cour d'appel du 3e ressort a refusé de reconnaître une décision espagnole de non-retour, estimant que les tribunaux espagnols auraient dû appliquer non pas leur droit mais le droit du New Jersey pour déterminer si le père avait un droit de garde.

La Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH)
La CourEDH est intervenue dans une affaire où le droit de garde avait été mal interprété.

Monory v. Hungary & Romania, (2005) 41 E.H.R.R. 37, [Référence INCADAT: HC/E/ 802].

Dans cette espèce, la CourEDH estima que les tribunaux roumains avaient violé l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH) en méconnaissant le sens de l'article 3 de la Convention de La Haye d'une manière si grossière que les garanties de cet instruments étaient elles-mêmes méconnues.

Âge et maturité requis

L’article 13(2) ne prévoit pas d’âge minimum à partir duquel il convient de s’enquérir des objections de l’enfant, il applique plutôt une formule qui indique que l’enfant doit avoir « atteint un âge et une maturité où il se révèle approprié de tenir compte de cette opinion ». Néanmoins, en formulant cette exception, les rédacteurs de la Convention avaient principalement en tête les adolescents qui ne souhaitent pas retourner dans leur État d’origine.

Indubitablement influencées par les pratiques internes en droit de la famille, différentes tendances se sont développées dans les États contractants quant à la manière d’appliquer cette exception. En outre, au fil de l’application de la Convention dans les États, ces tendances ont connu des évolutions, en particulier au fur et à mesure que les enfants ont été reconnus en qualité d’acteurs juridiques à part entière de leurs propres droits. En effet, au sein de l’Union européenne (UE), à tout le moins eu égard aux enlèvements cantonnés au territoire de l’UE, l’on doit veiller à ce que l’enfant ait la possibilité d’être entendu, à moins que cela n’apparaisse inapproprié eu égard à son âge ou son degré de maturité : Règlement Bruxelles II bis, art. 11(2).

La question de l’âge et de la maturité est étroitement liée au seuil appliqué dans le cadre de cette exception, autrement dit au critère utilisé pour déterminer les circonstances dans lesquelles il peut sembler approprié de prendre en compte les objections de l’enfant, voir par exemple Re T. (Enlèvement : Objection de l’enfant au retour) [2000] 2 FLR 192 [INCADAT cite HC/E/UKe 270] ; Zaffino v. Zaffino [2006] 1 FLR 410 [INCADAT cite HC/E/UKe 813]; W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [INCADAT cite: HC/E/UKs 805]; White v. Northumberland [2006] NZFLR 1105, [INCADAT cite: HC/E/NZ 902].

Australie

H.Z. v. State Central Authority [2006] Fam CA 466, INCADAT cite: HC/E/AU 876

Un enfant de huit ans a présenté des objections qui allaient au-delà d’une simple expression de sa préférence ou de souhaits ordinaires. Néanmoins, compte tenu de son âge et de son degré de maturité, il ne serait pas approprié de prendre son point de vue en considération.

Director-General, Department of Families, Youth and Community Care v. Thorpe (1997) FLC 92-785 INCADAT cite: HC/E/AU 212]

Reconnaissance du bien-fondé des objections d’un enfant de neuf ans.

Allemagne

4 UF 223/98, Oberlandesgericht Düsseldorf, [INCADAT cite: HC/E/DE 820]

Aucun âge limite fixé. Il a été jugé que l’enfant de huit ans manquait de maturité.

93 F 178/98 HK, Familengericht Flensburg (Family Court), 18 septembre 1998, [INCADAT cite: HC/E/DE 325]

Recueil des objections d’un enfant de six ans, mais elles n’ont pas été retenues.

Irlande

In the Matter of M. N. (A Child) [2008] IEHC 382, [INCADAT cite: HC/E/IE 992

Examen détaillé de l’âge à partir duquel il convient d’entendre l’enfant conformément à l’article 11(2) du Règlement Bruxelles II bis (Règlement du Conseil (CE) No 2201/2003 du 27 novembre 2003). Ordre de prendre en considération le point de vue d’un enfant de six ans.

Nouvelle-Zélande

U. v. D. [2002] NZFLR 529, INCADAT cite: HC/E/NZ 472

Recueil des objections d’un enfant de sept ans, mais elles n’ont pas été retenues.

Suisse

5P.1/2005 /bnm, Bundesgericht, II. Zivilabteilung (Tribunal Fédéral, 2ème Chambre Civile), [INCADAT cite: HC/E/CH 795

Pas d’âge minimum. Audition d’enfants âgés de neuf ans et demi et dix ans et demi, mais leurs objections n’ont pas été retenues.

5P.3/2007 /bnm, Bundesgericht, II. Zivilabteilung, [INCADAT cite: HC/E/CH 894

L’on considèrera qu’un enfant dispose de la maturité suffisante s’il est en mesure de comprendre la nature de la procédure de retour. Il n’a pas été possible de donner des directives générales quant à l’âge minimum à partir duquel un enfant serait capable de comprendre une question si abstraite. Le tribunal a toutefois constaté que les recherches dans le domaine de la psychologie enfantine avaient tendance à indiquer qu’un enfant ne serait capable d’avoir un tel raisonnement qu’à partir de 11 ou 12 ans. La Cour d’appel était donc en droit de ne pas recueillir les avis d’enfants âgés de neuf et sept ans.

Royaume-Uni - Angleterre & Pays de Galle

Re W (Minors) [2010] EWCA 520 Civ, [INCADAT cite: HC/E/UKs 1324

Prise en compte des objections de deux enfants de huit et presque six ans.

Le tribunal a admis que les objections d’un enfant de six ans tombant sous le coup de l’exception ne correspondaient pas à ce que les rédacteurs avaient envisagé. Cependant, Wilson L.J. a conclu « [… qu’]au cours des 30 dernières années, la nécessité de prendre des décisions à l’égard d’enfants de plus en plus jeunes qui ne correspondent pas nécessairement à leurs souhaits, mais dans tous les cas, à la lumière de ces souhaits, s’était imposée » [traduction du Bureau Permanent].

Royaume-Uni - Écosse

N.J.C. v. N.P.C. [2008] CSIH 34, 2008 S.C. 571, [INCADAT cite: HC/E/UKs 996

Pas d’audition d’un enfant de neuf ans et demi ; pas de prise en compte des objections de ses frères et sœurs de 11 et 15 ans.

W. v. W. 2004 S.C. 63 IH (1 Div) [INCADAT cite: HC/E/UKs 805]

Il a été jugé qu’une enfant de neuf ans n’était pas suffisamment mature pour que l’on prenne en compte son avis – décision du juge de première instance annulée.

États-Unis d’Amérique

Blondin v. Dubois, 238 F.3d 153 (2d Cir. 2001) INCADAT cite: HC/E/USf 585]

Pas d’âge minimum à partir duquel il convient de prendre en considération les objections d’un enfant. Prise en compte des objections d’un enfant de huit ans, dans le contexte de l’examen de l’exception de l’article 13(1)(b).

Escobar v. Flores 183 Cal. App. 4th 737 (2010), [INCADAT cite: HC/E/USs 1026]

Pas d’âge minimum à partir duquel il convient de prendre en considération les objections d’un enfant. Prise en compte des objections d’un enfant de huit ans.